Société
"Les règles ne s'arrêtent pas avec les inondations" : les Pakistanaises alarment dans un pays ravagé
Publié le 5 septembre 2022 à 12:41
Par Pauline Machado | Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Une association de défense des droits des femmes alerte sur un tabou particulièrement présent au Pakistan, et d'autant plus pressant dans un contexte d'inondations historiques : les menstruations et les produits périodiques indispensables aux personnes concernées.
"Les règles ne s'arrêtent pas avec les inondations" : les Pakistanaises alarment dans un pays ravagé
La suite après la publicité

Au Pakistan, les inondations ont recouvert un tiers du pays suite à des pluies de mousson record. Une catastrophe environnementale qui a touché plus de 30 millions de personnes, dont des centaines se sont retrouvées sans abri. Parmi les victimes, la moitié sont des femmes et des filles. Et si l'aide humanitaire est présente sur place, il est un produit de première nécessité qui manque cruellement : les serviettes menstruelles.

"Les règles ne s'arrêtent pas pendant les inondations. Les femmes ont besoin de cette aide", a ainsi déclaré Bushra Mahnoor, comme rapporté par France 24, une étudiante universitaire de l'est de Lahore qui a fondé la campagne Mahwari Justice pour pallier cette urgence. Dans les camps de réfugié·es, les douches sont quasi inexistantes.

En 2010, alors que des inondations gigantesques avaient déjà frappé la région, la jeune femme se souvient des vêtements tachés par les règles d'une adolescente. Elle a appris que les femmes "utilisaient des feuilles" pour gérer leurs règles, et a donc décidé d'agir.

Distribution de kits sanitaires

Avec sa collègue Anum Khalid, elles ont mobilisé ami·es et bénévoles pour collecter des fonds et mettre en place la confection de kits sanitaires d'urgence. A l'intérieur, des serviettes, des sous-vêtements et du savon. Le prix de chaque kit est de 200 roupies (0,90 euros), "mais peut faire une énorme différence pour les femmes qui tentent de conserver leur dignité dans des moments désespérés", précise le média. Surtout dans un pays où le tabou qui entoure les menstruations est particulièrement coriace.

"S'il vous plaît, envoyez n'importe quoi pour les filles qui ont leurs règles", a de son côté supplié une travailleuse sociale. "Elles n'ont rien et se sentent extrêmement humiliées de marcher ou de s'asseoir dans des abris avec des vêtements couverts de sang, la nourriture n'est pas ce qu'elles recherchent en ce moment, s'il vous plaît envoyez autant de produits sanitaires que possible."

Malheureusement, les réactions sexistes ne se sont pas fait attendre. Et la campagne lancée sur les réseaux sociaux par Anum Khalid et Bushra Mahnoor pour rassembler des volontaires qui viendraient emballer les kits, a été fermement critiquée par de nombreux hommes qui affirment qu'elle poursuit un "programme libéral". A noter que les inondations ont touché la province de Khyber Pakhtunkhwa, la partie la plus conservatrice du Pakistan, où les femmes sont rarement vues en public.

Sur Twitter, les réflexions d'internautes masculins sont aberrantes, insistant sur le fait que les produits périodiques sont un luxe et non une nécessité. "Pourquoi fournir des serviettes hygiéniques alors que vous pouvez fournir des repas. Pourquoi ne pas offrir des médicaments qui peuvent être utilisés quotidiennement plutôt que des serviettes qui ne doivent être utilisées que quelques jours par mois ?", ose l'un d'eux, quand d'autres jugent l'initiative de Khalid et Mahnoor tout simplement honteuse.

"Il serait plus honteux à mon avis de voir une fille qui a ses règles et qui n'a pas ce kit", a martelé une bénévole. Sans aucun doute.

Mots clés
Société Santé menstruations asie News essentielles Réchauffement climatique droits des femmes
Sur le même thème
"Tout me manque dans mon pays" : l'émotion du cinéaste en exil Mohammad Rasoulof, grand défenseur de la révolte des femmes iraniennes play_circle
Culture
"Tout me manque dans mon pays" : l'émotion du cinéaste en exil Mohammad Rasoulof, grand défenseur de la révolte des femmes iraniennes
12 septembre 2024
Théâtre : on a vu “La veuve rusée” aux Bouffes Parisiens, et c'est une satire ravageuse de la galanterie avec un casting aussi étonnant que déchaîné play_circle
Culture
Théâtre : on a vu “La veuve rusée” aux Bouffes Parisiens, et c'est une satire ravageuse de la galanterie avec un casting aussi étonnant que déchaîné
12 septembre 2024
Les articles similaires
Féminisme : mais qu'est-ce qui lie Julie Gayet à Gisèle Halimi ? play_circle
Société
Féminisme : mais qu'est-ce qui lie Julie Gayet à Gisèle Halimi ?
31 mai 2024
A Londres, les femmes noires sont davantage victimes de féminicides : pourquoi ? play_circle
Société
A Londres, les femmes noires sont davantage victimes de féminicides : pourquoi ?
29 mai 2024
Dernières actualités
Joker 2 : Joaquin Phoenix refuse de répondre à un journaliste en conférence (et explique pourquoi) play_circle
cinéma
Joker 2 : Joaquin Phoenix refuse de répondre à un journaliste en conférence (et explique pourquoi)
20 novembre 2024
Florence Pugh a fait congeler ses ovocytes à 27 ans : elle témoigne play_circle
Santé
Florence Pugh a fait congeler ses ovocytes à 27 ans : elle témoigne
20 novembre 2024
Dernières news