Diffusé ce dimanche 21 mars sur Canal +, le documentaire Je ne suis pas une salope, je suis une journaliste de Marie Portolano fait du bruit. La journaliste sportive y donne la parole à plus d'une vingtaine de consoeurs qui épinglent le sexisme de rédactions convoitées, aussi particulièrement présent sur les plateaux télévisés. "Blagues dégueu", "culture de boys club", des univers très masculins au coutumes parfois déplorables.
Seulement, comme le révèle le site Les Jours, ces révélations ne sont pas tout ce que dénonçait le reportage, à l'origine. Une partie aurait volontairement été censurée par la chaîne cryptée de Vincent Bolloré.
Plusieurs séquences qui incriminent le chroniqueur vedette Pierre Ménès, précisément. D'abord, par l'extrait du Canal Football Club de 2011, où il embrasse la présentatrice Isabelle Moreau par surprise. Lorsque Marie Portolano remontre les images à la journaliste au cours du documentaire, celle-ci fond en larmes. Ensuite, une autre agression sexuelle est mentionnée. Cette fois, les faits datent de 2016, là aussi sur le plateau du Canal Football Club. Hors antenne mais face au public, il soulève la jupe de Marie Portolano et lui attrape les fesses. Elle, lui répond par un "pain" au visage.
Ce qui manque aussi à la version finale, ce sont les réactions de Pierre Ménès aux actes dont témoigne la réalisatrice. Confronté aux images de 2011, il s'emporte, lançant qu'Isabelle Moreau réagit "à l'aune de #Metoo, de la société d'aujourd'hui". En ce qui concerne l'agression de 2016, il affirme ne pas s'en souvenir, ni comprendre pourquoi elle s'est sentie humiliée, rapporte l'AFP. Hervé Mathoux, présentateur historique du CFC, intervenait lui aussi, reconnaissant que certaines choses ne passeraient plus aujourd'hui, peut-on lire Le Parisien.
La raison invoquée par la direction du service des sports qui justifie sa décision de se délester d'autant de matière dans le documentaire ? Donner exclusivement la parole aux femmes. En interne en revanche, le quotidien évoque une toute autre explication : celle d'une censure délibérée pour protéger Pierre Ménès, ses confrères ayant été coupés au montage pour donner "l'impression d'un vrai choix éditorial". Le chroniqueur accusé n'aurait, quant à lui, pas demandé à en être retiré.
Aux Jours, Canal + a refusé tout commentaire. Pierre Ménès s'est contenté de lâcher : "Moi, je n'ai rien à dire. Je suis aux ordres de ma direction, moi. Moi, si ma direction n'a rien à dire, je n'ai rien à dire non plus. Surtout si c'est pour m'accuser de conneries et de merde. Si votre papier, c'est pour dire de la merde et relayer des conneries, ça m'intéresse pas."
Des "conneries" qu'on ressort sur Twitter, images et témoignages à l'appui, sous le hashtag #BalanceTonMenes ou #PierreMenesOut. Aux agressions sur Isabelle Moreau et Marie Portolano s'ajoutent ainsi des insultes racistes, antisémites, misogynes (la réalisatrice Aude Gogny-Goubert en dénonçait notamment en 2019) et un autre baiser forcé à la chanteuse et chroniqueuse Francesca Antoniotti, dans l'émission Touche pas à mon sport, en 2016. Un programme présenté par Estelle Denis sur D8.
L'"excuse" de Ménès ce jour-là ? Un "pari en loge". A croire que sur les chaînes de l'empire Bolloré, sexisme et impunité ont encore de beaux jours devant eux.