"Non à la guerre. Ne croyez pas à la propagande. On vous ment, ici". Voilà ce que l'on a pu lire sur une pancarte brandie ce 14 mars en plein journal télévisé de la chaîne Pervy Kanal, le plus regardé du pays. Marina Ovsiannikova, une employée de la chaîne, y a fait une brève apparition en arrière-plan, afin de relayer un message pour contrer la propagande russe et appeler à la fin de l'invasion de l'Ukraine.
"Les Russes sont contre la guerre", peut-on encore lire sur la pancarte.
Un acte de courage inouï, qui a rapidement engendré une coupure au sein du JT ainsi que l'arrestation de la jeune femme (elle encourt jusqu'à 15 ans de prison). Et surtout, une multitude de partages de ladite séquence sur la Toile.
Citoyenne moscovite de 44 ans, la journaliste avait préalablement enregistré une vidéo (publiée par OVD-Info) en expliquant face caméra : "Ce qui se passe en Ukraine est un crime, et la Russie est l'agresseur. La responsabilité de cette agression incombe à un seul homme : Vladimir Poutine".
"Malheureusement, ces dernières années, j'ai travaillé pour la chaîne d'informations Pervy Kanal. J'ai donc relayé la propagande du Kremlin et j'en ai vraiment honte : honte d'avoir laissé raconter des mensonges sur les écrans de télévision", détaille Marina Ovsiannikova dans sa vidéo dans laquelle la journaliste fustige également ce qu'elle nomme "la zombification du peuple russe".
"Allez manifester. N'ayez peur de rien. Ils ne peuvent pas tous nous emprisonner", y narre-t-elle encore, à l'adresse de ses nombreux concitoyens russes.
Ancienne nageuse née d'une mère russe et d'un père ukrainien, Marina Ovsiannikova dénonce aujourd'hui ce qu'elle considère comme "une guerre fratricide". Des paroles de protestation vive exigeant la fin de la guerre en Ukraine, et ayant suscité un émoi à l'international.
Son intervention sur le plateau d'Ekaterina Andreïeva a fait grand bruit. Un communiqué de la chaîne Pervy Kanal a précisé le jour même qu'une enquête interne avait été ouverte à propos de cet "incident". Comme le relate le Huffington Post, la journaliste risque notamment d'être poursuivie pour avoir "discréditer l'utilisation des forces armées russes".
Le député européen Raphaël Glucksmann appelle aujourd'hui à la mobilisation pour protéger cette courageuse lanceuse d'alerte : "Elle s'appelle Marina Ovsiannikova. Employée de la chaîne, elle a surgi dans le JT de la plus puissante chaîne télévisée de Russie avec une pancarte dénonçant la guerre et les mensonges de la télé. Elle est la figure même du courage. Elle est maintenant en prison. La seule manière que nous avons de l'aider est de faire en sorte que le monde entier connaisse son nom, salue son acte d'un courage fou et demande sa libération", écrit-il sur son compte Instagram.