Sur la séquence datée du 26 janvier, on voit une femme debout, dans des conditions glaciales, enchaînée par le cou à un mur de béton dans une hutte apparemment localisée à Xuzhou, dans la province orientale du Jiangsu. L'homme qui échange avec elle est visiblement choqué. Il lui distribue des vêtements chauds et essaie de lui poser quelques questions.
Identifiée comme Madame Yang, mère de 8 enfants et épouse de Monsieur Dong par les autorités, sans que les médias ne puissent obtenir son prénom, elle est incapable de répondre de manière cohérente, voire de comprendre ce que lui dit le visiteur.
Le lendemain, afin d'attirer l'attention sur les conditions inhumaines auxquelles elle est soumise, ce dernier publie la vidéo sur Douyin, propriétaire de TikTok, déclenchant une indignation à échelle nationale.
Les internautes, à juste titre horrifié·es par ces images, ne cessent d'interpeller les autorités nationales et locales pour qu'elles interviennent sans attendre. Et d'interroger : comment Madame Yang a-t-elle atterri là ? A-t-elle été kidnappée ? Est-elle réduite en esclavage ? A-t-elle consenti à ces grossesses ?
Une autre question revient fréquemment : considérant la politique restrictive de natalité en Chine, comment une femme a-t-elle pu donner naissance à autant d'enfants sans que les institutions ne se penchent plus sérieusement sur son cas ? Beaucoup ont également évoqué les mauvais traitements infligés aux femmes et leurs droits limités dans les zones rurales de Chine.
"Elle est une personne, pas un objet. Après avoir eu 8 enfants pendant 20 ans, on ne la retrouve qu'aujourd'hui ? Aucun des départements gouvernementaux et des organes judiciaires impliqués n'est innocent", condamne une personne en ligne.
Depuis vendredi 28 janvier, les discussions numériques sur cette affaire ont été fortement censurées depuis qu'elles ont éclaté. Les autorités ont également supprimé de nombreux messages évoquant le trafic d'êtres humains et ont tout bonnement censuré la phrase-clé "Xuzhou Eight Children".
Leur réponse aux sollicitations pressantes des Chinois·es s'est tout d'abord limitée à quelques informations vagues, et particulièrement stigmatisantes : Madame Yang aurait épousé Monsieur Dong en 1998. On lui aurait diagnostiqué une maladie mentale et la famille du mari aurait déclaré aux autorités locales que la mère avait souvent des accès de violence. Aucun commentaire sur la détention, son bien-être et l'utilisation des chaînes, ont vivement reproché les internautes dans la foulée.
Dimanche 30 janvier, un deuxième communiqué officiel est paru. "Monsieur Dong est soupçonné d'avoir violé la loi. Les autorités chargées de la sécurité publique ont ouvert une enquête à son sujet", peut-on lire. Par ailleurs, le texte affirme que la prisonnière (qui s'avérerait être atteinte de schizophrénie) serait désormais hospitalisée pour être soignée et que ses enfants auraient été pris en charge par l'État.
Une affaire qui, à en croire les 190 millions de vues sur ce document et les 56 000 commentaires dans la seule journée de lundi, pour la plupart critiques, n'est pas près de s'étouffer. Et ce, malgré les tentatives évidentes du gouvernement en ce sens.