Se pencher sur les droits des femmes dans le monde, cela revient bien trop souvent à plonger en pleine science-fiction... Sauf que la réalité, malheureusement, n'est jamais très loin. Et cette triste théorie se vérifie encore aujourd'hui en Egypte, qui s'est vue décerner le titre peu honorifique de "pire pays pour les femmes" du monde arabe par une étude de la Fondation Thomson Reuters : un député veut instaurer des tests de virginité pour les femmes qui posent leur candidature à l'université.
"Toute fille qui entre à l'université doit être examinée afin de prouver qu'elle est vierge", a affirmé le député Elhamy Agina au quotidien privé Youm 7 le jeudi 29 septembre 2016. "Elle devra présenter le résultat de son examen médical afin de prouver qu'elle est bien une 'Miss'", a-il ajouté, le terme "miss" étant couramment employé en Egypte pour faire référence aux vierges. Cette mesure aurait ainsi pour but de permettre seulement aux filles dites "pures" d'accéder à l'éducation, tandis que les femmes "de petite vertu" seraient rejetées dans les limbes de la société, en "femmes de mauvaise vie" qu'elles sont.
Comme le rappelle Le Point, contrôler la virginité des femmes est un moyen à peine voilé de limiter leurs libertés tout en s'accordant un droit de regard supplémentaire sur leur vie. Pour les religieux et les ultra-conservateurs, c'est un outil de choix pour contraindre les femmes. L'Egypte avait d'ailleurs déjà été rappelée à l'ordre par l'ONG Human Rights Watch parce qu'elle pratiquait régulièrement des tests de virginité sur les femmes arrêtées ou contrôlées. Le député Agina, en plus d'être sexiste et misogyne, pèche donc aussi par manque d'originalité ; mais Internet, qui se plaît dans le rôle de tribunal de l'humanité des plus aléatoires, se venge en le tournant au ridicule.
Il faut dire que Monsieur Agina n'en est pas à son coup d'essai : il est connu pour ses scandaleux dérapages. Ce mois-ci, il s'était notamment prononcé en faveur des mutilations génitales féminines, une pratique interdite en Egypte mais néanmoins encore très pratiquée : selon lui, réprimer de cette manière les envies sexuelles des femmes permettrait d'assainir la société, puisque cela permettrait de pallier à la "faiblesse sexuelle" des hommes.
Il avait également pris la parole après que 170 réfugiés se soient noyés au large des côtes égyptiennes le 22 septembre, pour expliquer qu'"ils ne méritaient aucune sympathie". Ces déclarations ont provoqué un véritable tollé sur la Toile, où les moqueries pleuvent entre deux appels au boycott du politicien. "Ne vous avais-je pas dit que nous étions encore loin d'avoir touché le fond et que le pire est à venir ?", a réagi sur Twitter Gamal Eid, célèbre avocat qui dirige le Réseau arabe pour l'information sur les droits humains. Quant au journaliste Khaled Dawoud, il taxe Agina de "membre de Parlement obsédé par le sexe" tandis que les internautes le taclent : "Il fait passer Trump pour un enfant de choeur", rapporte le site MIC .
Face à ce déferlement de critiques, Elhamy Agina a décidé de boycotter les médias après avoir expliqué qu'il proposait cette mesure pour ralentir les mariages coutumiers, des unions religieuses non officielles pour les musulmans qui sont accusées par les plus conservateurs de servir de couverture au sexe hors mariage. "Personne ne devrait s'offusquer de cette proposition", a protesté le député dans une interview pour Egyptian Streets. "Si elle vous dérange, cela signifie que vous avez peur que votre fille soit ou ait été dans un mariage coutumier derrière votre dos". On ne peut lui enlever ce mérite : Agina a l'art de se défendre en remuant le couteau dans la plaie.