"Non-protection d'enfant". C'est pour cette raison que Sarah Kadi et son avocate, Maître Myriam Guedj Benayoun, ont décidé de porter plainte contre l'État. Cette mère toulousaine lutte depuis des années pour que justice soit rendue auprès d'elle et de sa fille, Marie (son prénom a été modifié). Celle-ci aurait été attouchée par son père depuis ses 4 ans. Des violences qui ont donné lieu à des alertes et des expertises psychologiques. La jeune Marie fut notamment entendue par des spécialistes de l'enfance maltraitée.
"Lorsque Marie en a parlé pour la première fois, elle m'a dit 'Maman, papa me touche le zizi', relate Sarah Kadi auprès de Franceinfo, s'indignant que la justice ait maintenu le droit de garde de son ancien conjoint- un week-end sur deux et la moitié des vacances. Et ce, malgré une première plainte déposée la même année pour "faits incestueux". Une plainte qui fut classée sans suite par "manque de preuves".
Sarah Kadi explique également ne pas avoir été directement mise au courant lorsque son ancien conjoint a été jugé et condamné en 2019 à 2 ans de prison dont 6 mois ferme pour tentative de viol sur une autre mineure. Ni du fait qu'il avait été inscrit, dans le même laps de temps, au fichier des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes.
Concernant sa fille, il a finalement fallu attendre le mois de janvier 2022 pour que son ex-conjoint soit condamné par la Cour d'appel de Toulouse à 25 mois de prison et à un suivi socio-judiciaire de 3 ans pour "agression sexuelle incestueuse sur mineur".
Mais le combat de Sarah Kadi ne s'arrête pas pour autant. En portant plainte contre l'Etat, elle souhaite sensibiliser l'opinion publique et rétablir la justice. "Ma fillette n'a pas été protégée. Il n'y a eu que des dysfonctionnements. On parle d'inceste, ce n'est pas rien. Je comprends le principe de la présomption d'innocence, mais croire la parole d'un enfant est un principe de précaution. J'aimerais que la justice reconnaisse sa part de responsabilité dans cet échec", a-t-elle déclaré à France 3.
"Je témoigne car je souhaite que la peur et la honte changent de camp, que ces choses-là ne se reproduisent pas. Aussi pour que la justice n'attende plus qu'il y ait d'autres victimes pour condamner l'agresseur. Grâce aux médias, les choses vont bouger, je reste confiante", détaille Sarah Kadi auprès de Terrafemina.
Marquée par ces années "éprouvantes" de bataille juridique, Sarah Kadi dénonce également une stigmatisation des mères de famille, "considérées comme des femmes aliénantes", notamment au moment de la séparation. C'est aussi pour faire entendre la lutte contre le fléau de l'inceste qu'elle poursuit ses initiatives.
Une cause entendue à travers des mouvements initiés sur les réseaux sociaux, tel #MeTooInceste. La Ciivise (Commission indépendante sur l'inceste et les violences sexuelles faites aux enfants) estime que 160 000 enfants sont victimes chaque année de violences sexuelles. Et parmi elles, huit sur dix sont des victimes d'inceste. Dans la majorité des cas, l'agresseur est un homme du cercle familial : père, frère, beau-père, oncle, grand-père.