On pensait tout connaître de Matthew McConaughey. Ses premiers rôles balbutiants (Contact, En direct sur EdTV), ses performances majeures (Interstellar), son sacre mérité au Oscar (Dallas Buyers Club), mais aussi son accent texan, sa gouaille inénarrable ou encore sa formidable prestation sur petit écran en dépressif mystique (True Detective). Mais cela n'est que surface : l'acteur américain se dévoile enfin sans filtre dans un livre autobiographique : Greenlights.
Dans cet ouvrage paru le 20 octobre (et dont il assure la promotion lors d'une tournée littéraire virtuelle avec l'aide de l'acteur britannique Idris Elba), l'artiste met en lumière ses souvenirs les plus intimes. Ses traumas, également, comme le rapporte le magazine Variety. Au détour d'un chapitre, la star revient ainsi sur l'agression sexuelle dont il fut victime durant son adolescence. "À 18 ans, j'ai été agressé sexuellement par un homme, alors qu'on m'avait assommé à l'arrière d'une camionnette", écrit-il. Mais ce n'est pas la seule agression que relate l'acteur.
Car il y a également eu une autre expérience douloureuse, que la star évoque avec beaucoup de pudeur. "On m'a fait du chantage pour que j'ai mes premières relations sexuelles à l'âge de 15 ans. J'étais certain que j'irais en enfer si j'avais des relations sexuelles avant le mariage. Aujourd'hui, je suis à peu près certains que ce ne sera pas le cas", confie le quinquagénaire.
"Je ne me suis jamais senti comme une victime", écrit cependant Matthew McConaughey. "Aujourd'hui, tout le monde conspire pour me rendre heureux", ironise-t-il.
Ce relativisme est au coeur de son autobiographie, pour ne pas dire de sa vie, faite de souffrances et de sacres, professionnels et personnels, et donc de feux verts, rouges, oranges. Cependant, difficile de ne pas voir en ce témoignage une prise de parole bien moins minime que le comédien semble le croire. Au contraire, en couchant ce vécu sur le papier, Matthew McConaughey brise un tabou qui, quand il n'est pas inavoué, est raillé : le viol des hommes.
On ne compte plus le nombre de blagues que suscitent les agressions sexuelles que peuvent subir les hommes, des fictions aux réseaux sociaux. Comme la fameuse "blague de la douche" en prison. Mais depuis quelques années, la parole se libère enfin. Il y a deux ans de cela, l'acteur Terry Crews, victime d'agression sexuelle, insistait sur la chaîne TBS : "Il faut arrêter de faire ces putain de blagues. Que ce soit à propos des hommes violés en prison, ou des garçons qui se font molester. Ce n'est pas drôle". Et le comédien de rappeler que le mouvement #MeToo a également fait retentir des voix masculines, relatant de mêmes abus, physiques et psychologiques.
Sous l'effet de la révolution #MeToo, ce tabou tend à ne plus en être un. Des investigations épousent cet élan, comme le New York Times et son investigation ambitieuse réunissant de nombreux témoignages de militaires agressés sexuellement. S'exprimer à ce sujet est pourtant toujours ardu, au sein d'une société empreinte de virilisme, où tout aveu d'abus est perçu comme une faiblesse. Une entorse à la masculinité, source de dérision et d'humiliation. Espérons que les mots de Matthew McConaughey contribueront à changer la donne.