Comme tous les premiers lundis de mai (excepté 2020 pour des raisons évidentes), Anna Wintour a rassemblé la crème de la crème de la mode et de la culture – ou en tout cas à ses yeux – à sa petite sauterie ultra-select dans les couloirs du musée new-yorkais.
Cette année, l'iconique et parfois controversée rédac cheffe de Vogue a choisi le thème "Gilded Glamour and White Tie" pour inspirer ses invité·es. Une ode à l'Âge d'or américain, période faste au sortir de la guerre de Sécession où l'industrialisation a explosé, et où de grosses fortunes ont émergé. Mais à quel prix ?
Dans un article pour Le HuffPost, le journaliste Valentin Etancelin met en lumière les dessous de cette époque que l'événement semble avoir voulu idéaliser aveuglément.
"La croissance des salaires n'a pas été bénéfique à tout le monde, elle a été accompagnée par une hausse des inégalités de revenus", observe-t-il. "D'après les historiens George Brown Tindall et David E. Shi dans leur livre America: A Narrative History, les 2 % des ménages les plus riches détenaient entre leurs mains plus d'un tiers de la richesse du pays. La majorité de la classe ouvrière, elle, était en dessous du seuil de pauvreté. La fracture n'avait jamais été aussi flagrante."
Une situation qu'on peut difficilement ne pas comparer aux conséquences des crises économiques et sociétales survenues ces deux dernières années. D'autant plus aux Etats-Unis, où les aides sociales se font rares.
"Suis-je la seule à penser que le thème du #MetGala de cette année est déconnecté de la réalité ?", a ainsi épinglé une "grande fan" du Met Gala sur Twitter. "Les inégalités sont au plus haut niveau depuis l'Âge d'or, une pandémie et un effondrement économique nous ont anéantis, l'inflation est hors de contrôle...", énumère-t-elle, dépitée. "Mais c'est cool, portons des robes sur le thème de l'Âge d'or et rions des inégalités". Et de conclure : "Le thème de cette année est une gifle pour l'Américain moyen."
L'Américain·e moyen·ne qui, en 2022, subit de plein fouet la baisse du PIB de 0,35 % entre janvier et mars, quand les 1 % des plus riches peuvent se permettre de débourser 35 000 dollars (32 000 euros) pour un repas, et s'afficher dans des tenues qui en valent au moins la moitié, l'espace de quelques marches d'escalier.
A ce sujet d'ailleurs, la réussite n'était pas non plus au rendez-vous. Celles et ceux qui auraient voulu se consoler en se concentrant sur la mode, au centre de la soirée, n'ont pas eu grand-chose à se mettre sous la dent si ce n'est un succès de la robe réversible de Blake Lively, magistrale en Versace. Ou de Lizzo, sublime dans une robe Thom Browne brodée à la main, flûte à la bouche sur red carpet.
Cette année, malheureusement, pas de "Tax the Rich" couleur sang peint sur la robe de la députée Alexandria Ocasio-Cortez pour ajouter un peu de sel, et de redescente sur Terre, à une soirée entre ultra-privilégié·es. Peut mieux faire, sur tous les plans.