Veste kimono aux découpes épousant les seins, cravate estampillée d'un "Pouvoir" en sequins, large ceinture rose... C'est un défilé théâtralisé d'un autre genre, intitulé Decorum, que les étudiant·e·s de l'école de mode et de stylisme Atelier Chardon Savard de Paris et Nantes ont voulu imaginer. Une mode hybride pour célébrer les "masculinités plurielles". Leur défi ? Créer des vêtements "dégenrés", émancipés des codes associés au masculin et au féminin, le temps d'une performance le 4 février dans le cadre du très alléchant Festival Être un homme à Nantes.
"Il y a une réelle interrogation chez cette génération. Une interrogation qui n'est pas un effet de mode comme certains peuvent le penser", confie la metteuse en scène Katelle Prugnaud, qui a accompagné les jeunes stylistes dans l'élaboration de ces créations. "Lors de cette préparation, j'ai été témoin de beaucoup de discussions et d'échanges sur ce sujet qui est loin d'être cadré, car en perpétuel mouvement. Les élèves cherchent à redéfinir les normes de ce qui était jusqu'alors immuable."
Lors de ce show hors normes, chaque création sera portée par les étudiant·e·s du Conservatoire. "Nous avons essayé d'oublier le fait que c'était des silhouettes pour des hommes ou bien des femmes. Au contraire, c'était des vêtements pour une personne, un être humain, une personnalité", précise Lorene Spanevello, étudiante à l'Atelier Chardon Savard.
Alors que des acteurs comme Brad Pitt ou Robert Pattinson enfilent une jupe pour fouler le red carpet et que l'irrésistible Timothée Chalamet s'amuse à malaxer les codes de la masculinité, ce défilé gender fluid s'inscrit dans une nouvelle ère vestimentaire décloisonnée, plus ludique, plus complexe, plus stimulante aussi, affranchie des carcans traditionnels et nourrie de pop-culture.
"M'intéressant depuis longtemps à la question du genre, je me suis inspirée de figures trans et gay pour ce thème", détaille Charlotte Gauthier, autre étudiante à l'Atelier. "Quand je pense à des personnes qui jouent avec la question de masculinité, je pense à des icônes comme David Bowie ou bien Yves Tumor, Lil Nas X. L'univers des drag queens a été, je pense, une inspiration majeure pour tout le monde."
Mais à quoi ressemble donc ce "masculin pluriel" pensé par les élèves ? "Je l'imagine libre, libre de porter ce qu'iel veut sans être jugé·e, agressé·e ou encore mégenré·e. Je l'imagine fort·e, imposant·e et surtout assumé·e", avance Lorene Spanevello. La metteuse en scène Karelle Prugnaud se laisse elle aussi porter par ce nouveau champ des possibles : "Pour le moment, je n'ai pas de représentation de ce que doit être le masculin pluriel car nous sommes tous construits à partir de normes sociales. Je préfère dire que le masculin pluriel tel que je l'imagine n'existe pas car, chaque jour, de nouvelles données viennent alimenter mon imaginaire."
Infos pratiques :
Decorum, mis en scène par Karelle Prugnaud
Le 4 février 2023 à 15h
Salle Stereolux
2 allée Frida Khalo
44263 Nantes