Vous ne pouvez pas vous en empêcher. Que vous soyez plongée dans le dernier épisode de Game of Thrones , dans le métro après le boulot ou lors d'un week-end avec vos enfants, il vous arrive régulièrement de sortir de votre téléphone de votre poche ou d'ouvrir un nouvel onglet sur votre ordinateur pour vérifier votre boîte mail pro.
La faute aux écrans et à la nouvelle technologie qui ont envahi notre quotidien, certes, mais aussi à notre incapacité à dresser une barrière nette entre notre vie professionnelle et notre vie personnelle. On appelle ce phénomène le blurring, de "blur", qui signifie "flou" en anglais.
Qu'ils soient du fait de la technologie qui a progressivement bouleversée nos vies ou du nôtre, incapables de déconnecter en posant toute une soirée notre smartphone, le blurring a un impact forcément néfaste sur notre vie privée, ainsi que sur notre santé. Une étude parue en septembre 2014 dans la revue médicale Chronobiology médicale International a par exemple prouvé que ne pas décrocher du boulot une fois rentrée chez soi pouvait conduire à développer des problèmes de santé, tels que des troubles cardiovasculaires, musculo-squelettiques, gastro-intestinaux et psychologiques.
Sans même plonger le nez dans les revues scientifiques, il suffit de voir dans quel état peut nous mettre un mail tardif pour un dossier non terminé dans les temps ou contenant une requête abracadabrante de son boss pour se rendre compte que consulter ses e-mails professionnels à la maison est une mauvaise idée. Mais même en le sachant bien, nous persistons à jeter un oeil le soir à notre boîte du travail.
Jennifer Deal pense savoir pourquoi. Dans un article publié sur un blog scientifique hébergé par le site du Wall Street Journal , cette neuropsychologue, chercheuse au "Center for Creative Leadership" et auteure d'un livre sur les aspirations de la génération Y au travail explique ce qui nous empêche de décrocher du travail une fois notre journée ou semaine achevé : l'effet Zeigarnik.
Nommée ainsi d'après la psychologue et psychiatre russe Bluma Zeigarnik, ce syndrome désigne notre tendance à mieux nous rappeler des tâches inachevées que de celles que nous avons menées à bien. Cela est particulièrement vrai lorsqu'il s'agit des personnes ayant d'importantes responsabilités. "Parce que le travail des cadres, des gestionnaires et des professionnels haut gradés est rarement terminé, ils présentent un profil pouvant être soumis à l'effet Zeigarnik. Pire encore, ceux qui ont un besoin élevé de réalisation semblent encore plus soumis à ces effets", explique Jennifer Deal.
Même si vous ne pouvez pas vous empêcher de songer à ce dossier laissé en suspens sur votre bureau vendredi soir ou que vous vous rongez les sangs parce que vos vacances coïncidaient avec une présentation clients importante, rassurez-vous : d'après Jennifer Deal, il est tout à fait possible de réduire cet effet Zeigarnik.
Pour cela, il est primordial d'"occuper" votre cerveau. En vous plongeant dans une activité vraiment prenante et exigeant une attention constante – une partie de tennis, l'élaboration d'une recette un peu compliquée, une sortie avec vos enfants – ce problème de boulot non-réglé est relégué au second plan et arrête de nous tracasser, du moins pendant quelques heures.
L'autre solution prônée par la spécialiste est plus radicale mais plus efficace : il s'agit d'éteindre son téléphone et de le garder dans un lieu inaccessible et loin de soi. Le confier à son ou sa conjoint.e qui prendra soin de le cacher ou "l'oublier" à la maison le temps d'un week-end à la campagne peut s'avérer être une excellente idée. En n'ayant plus à proximité l'objet de tentation que constitue votre smartphone ou votre ordinateur portable, vous ressentirez de moins en moins l'envie de vous ruer dessus. Jusqu'à finir, peut-être, par vraiment vous relaxer et profiter de votre soirée, votre week-end ou vos vacances.