C'est un travail titanesque auquel se sont attelées les militantes d'Osez le féminisme : répertorier des centaines de vidéos violentes présentes sur nombreux sites pornos, et les signaler sur la plateforme du ministère de l'Intérieur Pharos. Un site notamment connu pour les signalements de contenus en lien avec la radicalisation et le terrorisme.
"Les vidéos signalées sont des contenus illégaux hébergés par des sites pornographiques : actes de torture et de barbarie, incitations à commettre des crimes et des délits, pédocriminalité, viols, apologie de la haine raciale", précise l'association dans un communiqué. "Ces images intolérables contreviennent au droit pénal et international mais restent accessibles à toutes et à tous sur Internet".
Auprès de FranceInfo, Alyssa Ahrabare, l'une des porte-paroles du collectif, développe : "Ce qu'on dénonce, c'est que la pornographie sert maintenant d'alibi, en quelque sorte, à énormément de crimes et de violences. Sous couvert de représenter de la sexualité, il y a en fait une véritable impunité de ces plateformes qui mettent en ligne des vidéos qui sont des actes de tortures, des viols filmés."
Aujourd'hui, grâce à leur travail, les choses commencent à bouger. En novembre, dans l'affaire "French Bukkake", quatre "acteurs" porno français ont été mis en examen pour "viols en réunion".
Les catégories, voire les noms des séquences elles-mêmes révèlent les crimes qui y sont opérés ou glorifiés. "Inceste, prise de force, étouffement", énumère Franceinfo. Et "l'impact sur la société toute entière est frappant", observe tragiquement Osez le féminisme.
"L'exposition des jeunes à ces contenus (l'âge moyen du premier visionnage d'une vidéo pornographique en France est situé entre 13 et 14 ans d'après l'IFOP) a des répercussions sur leur développement et la construction de leurs modèles sexuels, des comportements violents sont banalisés et reproduits, des crimes sont normalisés et érotisés." Un risque d'autant plus conséquent que les plateformes visées sont très visitées : Pornhub, Jacquie et Michel...
"Si on avait accès à ce même genre de contenu dans n'importe quel autre contexte, ces vidéos seraient immédiatement considérées comme violentes, bannies, condamnées", dénonce encore Alyssa Ahrabare. "En revanche, comme il s'agit de sites pornographiques, ça passe pour de la sexualité, de la liberté d'expression, etc... Il y a une espèce d'impunité autour de ces vidéos-là."
Leur souhait ? Alerter l'Etat pour obtenir le retrait des contenus, et par la même occasion une protection réelle des victimes filmées comme des plus jeunes utilisateurs et utilisatrices de ces images. Mais à en croire Ursula Le Menn, autre porte-parole de l'association, le sujet ne semble pas être une priorité aux yeux du gouvernement.
"On a créé des systèmes juridiques contre le téléchargement illégal, il y a des années avec Hadopi. Et ça, c'est plus grave que la pornographie apparemment. C'est plus grave que la diffusion de vidéos de viol de femmes, de viols d'enfants ? C'est incroyable", s'indigne-t-elle auprès de Franceinfo. Et de marteler : "On attend avec ces signalements que, enfin, le gouvernement et les pouvoirs publics se bougent en France comme à l'international".