"Pourquoi porte-t-elle un symbole hindou les seins nus ? C'est une honte !", "Comment est-ce possible de poster une photo comme celle-ci, avec un symbole si fort autour du cou ? Je suis vraiment très déçue", "Vous blessez toute la communauté hindoue avec cette photo". Ces commentaires d'internautes en colère défilent sous la dernière publication Instagram de Rihanna.
En cause : un cliché d'elle topless, parée de grosses perles mauves et d'un pendentif qui représente Ganesh, le dieu hindou de la sagesse, de l'intelligence, de l'éducation et de la prudence.
"Vous portez un collier de divinité et un Murthi [symbole] de ma culture qui a déjà été suffisamment appropriée culturellement ces dernières années. Comment est-ce possible quand une personne a plus qu'assez de ressources pour au moins découvrir la signification et l'importance des chaînes et du pendentif autour de son cou ?", résume une autre utilisatrice, dont le texte court a été largement relayé sur les réseaux sociaux et les sites d'infos.
Ce n'est pas la première fois que la star barbadienne est accusée de blasphème et d'appropriation culturelle. Lors du défilé de sa marque Fenty déjà, diffusé en octobre dernier sur Amazon Prime, la créatrice avait choisi la chanson Doom de l'artiste française Coucou Chloé pour rythmer la présentation de sa collection. Seulement, celle-ci reprenait un hadith, une phrase tirée du recueil des actes et paroles du prophète Mohammed et de ses compagnons, à propos de commentaires du Coran ou de règles de conduite, remixé au son de la mélodie. Une initiative vivement critiquée par la communauté musulmane auprès de laquelle Rihanna s'était rapidement excusée, estimant qu'il s'agissait d'une "erreur honnête, mais négligente".
Aujourd'hui, ce sont les personnes hindoues ou d'origine hindoue qui se sentent blessées, et le font entendre à la star - laquelle ne s'est pas encore prononcée.
Pour la journaliste Rajul Punjabi en revanche, ces réactions - bien qu'elle comprenne leur origine - passent à côté de l'essentiel. Dans les colonnes du magazine américain Mic, elle détaille son point de vue, celui d'une femme indo-américaine élevée dans la culture hindoue. Et estime important de rappeler : "Une chose cruciale à garder à l'esprit lorsque l'on mène le bon combat est que les exemples les plus dommageables d'appropriation culturelle se produisent lorsqu'une culture dominante vole, profite ou adopte la culture d'une communauté marginalisée comme étant la sienne. Ce n'est pas le cas."
Selon elle, se concentrer sur Rihanna est même une perte de temps, et soupçonner qu'elle soit ignorante et nuise à l'hindouisme, tout bonnement incorrect. La rédactrice note d'ailleurs que pas plus tard qu'en janvier, la chanteuse avait alerté sur le combat des fermiers indiens, s'attirant les foudres du gouvernement local.
En ce qui concerne la "sexualisation" d'un symbole sacré dont elle serait coupable à en lire de nombreux commentaires, la jeune femme épingle : "J'ai été élevée en tant qu'hindoue et je peux donc vous dire, en toute connaissance de cause, que l'hindouisme a longtemps été sexuel. N'oubliez pas qui vous a apporté le Kama Sutra."
Elle invite alors à ne pas s'éparpiller, et à cibler un ennemi commun à l'origine de bien des maux. "Réorientez plutôt votre rage vers les systèmes de suprématie blanche qui ont pillé notre culture pendant des siècles. Mobilisons-nous pour les démanteler et faire prendre conscience des mécanismes qui continuent à nous nuire - le colorisme, le racisme anti-noir et l'homophobie, pour n'en citer que quelques-uns."
Et Rajul Punjabi d'insister : "A tous mes semblables furieux que Rihanna porte un collier d'un dieu hindou : Nous avons des chats plus gros et plus blancs à fouetter".