Certains parlent de « parité imposée ». D’autres de « fausse bonne idée ». D’autres enfin, comme la ministre des Droits des femmes Najat Vallaud-Belkacem de « pas important pour la parité ». Mercredi 17 avril, après de nombreux aller-retour du projet de loi, le Parlement a définitivement voté le projet de loi relatif aux scrutins locaux qui instaure le scrutin binominal paritaire pour les élections cantonales défendu par Manuel Valls.
Le texte prévoit que les électeurs désigneront tous les six ans, au scrutin majoritaire à deux tours, un binôme homme-femme pour les représenter au conseil départemental, futur nom du conseil général. L’objectif : passer de 13,5% de femmes dans les conseils généraux à 50%. Une initiative qui « réjouit » Mme Vallaud-Blekacem, qui s’est félicitée dans un communiqué de voir ces statistiques rejoindre l’« histoire ancienne » et de pouvoir être sûre que « dès les prochaines élections cantonales », seront élus 50% d’hommes et 50% de femmes au dernier échelon des collectivités territoriales « qui ne connaissait pas encore la stricte égalité femmes-hommes ». « C’est un pas important pour la parité, mais aussi un pas important pour la rénovation de la vie politique, qui est attendue de longue date », souligne la ministre.
En pratique, pour pouvoir appliquer le texte et ne pas modifier le nombre total de conseillers, le nombre de cantons sera divisé par deux et passera de 4000 à 2000, ce qui demandera un redécoupage de la carte des cantons. Par ailleurs, les élections départementales et régionales, prévues pour 2014, sont repoussées à 2015. Reste que pour pouvoir entrer en vigueur, le texte doit encore passer l’obstacle du Conseil constitutionnel. Et les sénateurs et députés UMP et UDI ont annoncé dès mercredi après-midi avoir déposé un recours.
Le projet de loi défendu par le ministre de l’Intérieur Manuel Valls a déjà été rejeté à plusieurs reprises au Sénat et suscite les divisions. Ainsi, en décembre dernier, la présidente de la délégation aux Droits des femmes Catherine Coutelle dénonçait sur Terrafemina une « fausse bonne idée ». « La parité dans les conseils généraux est certes une question à traiter d'urgence, estimait-elle. (Mais) l'instauration d'un scrutin binominal est pour moi une proposition choquante et humiliante pour les femmes. Cela revient à dire que les femmes n'arriveront jamais par elles-mêmes dans les conseils généraux. » La loi a finalement été votée par 273 voix pour (les socialistes et quelques radicaux de gauche), 247 contre (l’UMP, l’UDI, le Front de gauche et une majorité des radicaux de gauche) et 20 abstentions (principalement les Verts).
À droite, on pointe du doigt « le plus grand tripatouillage électoral de la Ve République», selon les mots de François Sauvadet (UDI), qui moque un système qui instaure « deux personnes élues ensemble mais exerçant séparément leur responsabilités ». « Vous avez peur du résultat des urnes en 2014, alors vous repoussez les élections à 2015 », a accusé quant à lui l’élu UMP Guillaume Larrivé. À gauche également on critique le texte de loi, voyant dans ce scrutin, comme le PCF Gaby Charroux, « un anachronisme démocratique car le seul à ne pas connaître une part de proportionnelle ». Chez les socialistes en revanche, on se félicite de ce nouveau mode de scrutin permettant « la proximité, la diversité et la parité ».
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