La "Journée de la Jupe", ce n'est pas juste un curieux film avec Isabelle Adjani en prof énervée (et césarisée). C'est l'intitulé d'une initiative visant à sensibiliser les esprits quant à la réalité du sexisme ordinaire. L'idée ? Afin de rappeler aux filles qu'elles sont libres de s'habiller comme elles le souhaitent, l'établissement les incite une journée durant à porter la jupe, simple vêtement et pourtant source malheureuse et éternelle de slut-shaming - ces remarques sexistes visant systématiquement l'attitude et le corps des femmes.
Et c'est justement une Journée de la jupe qui s'est tenue le 16 mars dernier au lycée professionnel Joseph Cugnot, à Chinon, comme nous l'apprend France Bleu. Des profs ont même porté cette tenue afin que le message passe d'autant mieux. Plus encore, la jupe aurait été arborée par certains garçons solidaires.
La professeure d'EPS, Eugénie Kling, à l'initiative de cette journée un peu particulière, raconte : "Nos filles n'osent pas se mettre en jupe par rapport aux regards des garçons, qui sont plus nombreux. On a besoin de cette journée pour qu'elles osent davantage. Chacun doit pouvoir s'habiller comme il le souhaite, sans aucune remarque ou propos sexiste".
Les paroles d'Eugénie Kling expriment tant d'évidences qu'il semble déplorable de les rappeler. Et pourtant, c'est nécessaire. "On a reçu des remarques nous disant qu'on était bonnes, on faisait que de nous regarder à la cantine, on rigolait sur nous...", "Il y a beaucoup trop de jugements, de remarques, d'insultes et de regards envers les filles qui portent des jupes", témoignent à la radio locale deux lycéennes de seize ans, Fallone et Candyce. Pour ces élèves de Terminale, harcèlement et remarques bien sexistes sont hélas du domaine de l'ordinaire.
"Ça me soûle qu'il y ait tout le temps des remarques sexistes envers les filles alors je voulais les soutenir", poursuit leur camarade Kylian, 16 ans, élève de Première arborant cette jupe par solidarité. Et si organiser une Journée de la jupe semble être une démarche plus symbolique qu'autre chose, ce genre d'initiatives importe tout de même pour éveiller autant que faire se peut les consciences. C'était le cas par exemple en octobre dernier au Québec lorsque des lycéens avaient adopté le vêtement pour dénoncer les restrictions vestimentaires dans leurs établissements scolaires.
Il faut dire que le sexisme ne s'arrête pas à ces histoires de jupes. C'est ce dont témoigne Rebecca, autre élève du lycée de Chinon. Au journal La Nouvelle république, elle raconte par exemple la fois où un professeur l'a dissuadé de poursuivre des études en Mécanique, secteur essentiellement masculin. Elle aurait également été victime d'attitudes sexistes de la part du même professeur. "Il m'a dit que s'il avait la braguette ouverte, c'était à cause de moi. Je l'ai regardé droit dans les yeux et lui ai dit que c'était soit lui, soit moi et que j'allais tout faire pour qu'il soit viré", poursuit-elle. Le professeur en question finira par démissionner.
Au sein même des lycées, entre élèves mais aussi entre élèves et profs, le sexisme fait donc bel et bien l'objet d'un long combat.