"C'est une chance qu'on n'a pas dans notre pays": dans le nord de la Thaïlande, un couple queer originaire de Birmanie a célébré son union symbolique, devant un public enthousiaste de milliers de personnes réunies pour le début du mois des fiertés.
Nyan, 45 ans, et Mae, 40 ans, risquent la répression et la prison dans leur pays natal, déchiré par un conflit civil qui a éteint pour eux toute perspective d'avenir.
"En Birmanie, tout le monde risque sa vie pour combattre la junte pour obtenir la justice", explique Nyan, un chercheur qui s'identifie comme homme queer.
"C'est notre révolution. Nous allons nous marier et puiser de la force des autres qui se battent au nom de la justice", poursuit-il.
Les deux se sont donnés de nouveaux noms pour marquer leur nouvelle identité.
En Birmanie, des personnes LGBT+ sont régulièrement victimes de violences et de discriminations, en vertu de lois héritées de la période coloniale britannique interdisant les relations homosexuelles.
La Thaïlande, de son côté, s'apprête à devenir le premier pays d'Asie du Sud-Est à autoriser l'union entre personnes de même sexe, après des années de combat des militants pour changer les mentalités conservatrices ancrées dans la culture bouddhique.
Le texte, approuvé par les députés, est actuellement à l'étude au Sénat, et devrait entrer en vigueur ces prochains mois, après l'accord final du roi.
"C'est une chance qu'on n'a pas dans notre pays. Nous allons la saisir ici" quand la loi sera passée, se félicite Mae, une militante pour l'environnement qui s'identifie comme femme et queer.
Le couple a échangé ses alliances dans un temple bouddhique, avant de participer à une cérémonie de mariage sans valeur officielle, en compagnie de deux autres couples, sur scène, au terme de la marche des fiertés de Chiang Mai.
Le mois des fiertés, en juin, donne l'occasion de multiples célébrations à travers la Thaïlande, où des commerces s'affichent avec le drapeau arc-en-ciel symbole de la communauté LGBT+.
Chiang Mai, capitale du Nord touristique et montagneux, a accueilli dimanche une parade qui a rassemblé entre 2.000 et 3.000 personnes. En 2009, l'événement avait été annulé en raison de menaces de l'opposition conservatrice.
La ville abrite également une forte communauté birmane, qui a grandi à la suite du coup d'Etat de 2021 contre Aung San Suu Kyi.
Sirisak Chaited, qui a organisé la marche des fiertés de Chiang Mai, a confié son bonheur de voir des couples étrangers joindre l'événement.
"Si la Thaïlande passe la loi, celle-ci peut servir d'inspiration pour nos pays voisins pour se battre pour le mariage pour tous, comme nous", espère Sirisak, qui privilégie le pronom neutre en anglais "they/them", ou "iel" en français.
Mais les progrès ne s'opèrent que trop lentement, nuance l'activiste, et la communauté LGBT+ continue malgré tout de souffrir de discriminations dans le pays.
"La loi aurait déjà dû être votée" en Thaïlande.
"Bien sûr qu'il y aura des mariages l'an prochain. Mais les célébrations ne signifient pas la fin de notre mouvement, et le combat va continuer", affirme Sirisak.
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