Que se passerait-il si deux ados vivant à deux époques différentes venaient à échanger leur place ? C'est le point de départ de L'aventure des Marguerite de Pierre Coré, adaptation de la bande dessinée de Robin et Vincent Cuvellier. Dans ce long-métrage, qui entremêle aventures et fantastique, Marguerite et Margot (interprétées par la formidable Lila Gueneau) ont toutes les deux 12 ans, mais l'une vit en 1942 et l'autre en 2018. Jusqu'à ce qu'une malle magique les catapulte dans leur époque respective.
Un univers merveilleux qui a immédiatement enchanté la comédienne Alice Pol. Emballée par cette aventure, elle a enfilé la robe de Tante Alice, jeune femme corsetée qui se libérera progressivement aux côtés de la jeune "Visiteuse" Margot. Car l'actrice, fidèle de Dany Boon (Raid Dingue, Supercondriaque), aime s'amuser au gré de ses rôles. Et chérit sa liberté par-dessus tout. C'est donc avec un large sourire qu'elle nous a parlé (par écran interposé) de ce conte familial et de ses inspirations, libérée et soulagée après deux mois de confinement.
Alice Pol : J'ai été séduite par son univers très fort, par le merveilleux, par l'enfance. J'ai besoin, tous les deux ans minimum dans ma filmographie, de faire un film familial, où on a envie d'amener ses enfants, ses petits-enfants. C'est très important, c'est l'essence et le sens de ce métier pour moi. Et j'ai été séduite par Pierre Corré, qui est un cinéaste accompli et qui aime les acteurs, les techniciens, tout le monde. C'est aussi comme ça qu'on fait des films qui "décollent" selon moi. Et j'ai senti ça chez Pierre et sur le tournage.
Vous décrivez votre personnage de Tante Alice comme un mélange de professeur Tournesol et d'Amélie Poulain. Expliquez-nous.
A.P. : Elle a l'ingénuité d'Amélie Poulain, l'imaginaire qui part un peu partout... Elle n'a pas encore vécu d'histoire d'amour donc elle dévore les bouquins et on voit bien que ça la travaille. Et pour le professeur Tournesol, c'est parce qu'elle n'est pas dans le réel. Elle a 35 ans, elle n'a jamais rien vu ni vécu. Elle ne discute avec personne à part avec ses parents.
Le personnage de la tante Alice ne serait-il pas une féministe qui s'ignore ? Elle est indépendante, intrépide et s'émancipe au cours du film.
A.P. : Oui, c'était l'enjeu de ce personnage pour moi. On a notamment beaucoup travaillé sur son look : au départ, elle est très guindée, sa coiffure est très stricte. Et au fur et à mesure, les cheveux s'envolent, le décolleté s'ouvre, elle perd même sa jupe... Le jour où elle s'enfuit de chez son père en lui piquant sa voiture, on sent qu'elle s'est tellement retenue de vivre que cela explose. J'adore ça, c'est jouissif à jouer. C'est la découverte de la vie, de l'amour, du bordel, de tout ! Elle s'émancipe et on voit à la fin du film que ça ne va pas s'arrêter là... Elle ne vivra plus comme une petite dame bien rangée.
A.P. : La Seconde Guerre mondiale est l'époque sur laquelle nous sommes le mieux renseignés, notamment grâce à l'école, aux livres, aux films, aux séries. Je n'ai donc pas spécialement étudié ça. Mais il y a des choses qui m'ont marquée, notamment avec la scène dans le camp. Je me retrouve avec Lila Gueneau à 6h du matin dans le brouillard... On rigolait au maquillage-coiffure et en arrivant sur place, nous ne rions plus du tout. Il y avait tous ces figurants, des adultes, des enfants, des personnes âgées... On avait d'un coup l'impression d'y être. C'était violent.
A.P. : Pas au Moyen-Âge, il faisait trop froid. La Préhistoire non plus... Je dirais les années 70 : ça avait l'air fun et insouciant. En tout cas, c'est l'idée qu'on s'en fait.
A.P. : Je pense souvent à des choses tragiques. Je suis quelqu'un de très angoissé et j'ai cogité pendant le confinement... En même temps, à toutes les époques, des choses terribles sont arrivées, les gens ont vécu des choses dures et j'essaie de relativiser comme je peux. Professionnellement, j'ai à coeur qu'on se remette à rêver, à s'évader, à s'émouvoir. On a besoin de rêver sinon, nous n'aurions pas été si malheureusement d'être coupés les uns des autres pendant le confinement. D'ailleurs, je suis ravie : je pars sur le tournage d'un film en août. La vie reprend !
A.P. : Oui. Je me considère comme femme depuis toujours donc je ne vois pas comment il pourrait en être autrement !
A.P. : Ma mère, parce que c'est un être dense et il y a de quoi faire avec elle.
George Sand aussi parce que j'ai toujours eu une fascination pour elle dès le collège et le lycée, dès les premières lectures.
Et puis Beyoncé parce qu'elle est complètement dans notre époque, il y a un truc complètement assumé, de force, de féministe, ses photos sont explosives, elle montre qu'elle est là, elle nous dit : "J'ai le droit d'être belle, de chanter, de réussir ma vie."
A.P. : Les soeurs de Cat's Eyes, le dessin animé. Elles se battaient hyper bien !
A.P. : Les trois personnages féminins de Killing Eve. L'espionne britannique jouée par Sandra Oh est incroyable. Cette actrice a une force et une détermination folles, elle envoie du bois... J'adore ça ! Et quand ça passe par un personnage féminin, c'est encore mieux.
A.P. : L'égalité salariale, on n'y est toujours pas ! Et pas simplement que pour les actrices...
A.P. : La Grenade de Clara Luciani.
A.P. : "La passion fait souffrir, mais si l'homme – ou la femme ! – s'en affranchit, il découvre l'ennui". C'est très vrai. La passion, ça fait du souci, mais sans ça, je ne saurais pas trop quoi faire...