Le 8 mars dernier, pour la Journée internationale pour les droits des femmes, de nombreuses associations féministes ont appelé les femmes actives à cesser de travailler à 15h40 afin de lutter contre les inégalités salariales entre femmes et hommes. À la lumière de la nouvelle étude de l'Insee sur le sujet, ce type d'action prend tout son sens.
Publiée mardi 4 juillet 2017, cette nouvelle enquête réalisée avec la University College of London s'intéresse en particulier aux écarts de rémunération entre femmes et hommes dans le secteur privé. Premier constat : malgré les efforts fournis par certaines sociétés et les différentes mesures législatives censées booster l'égalité salariale, femmes et hommes ne sont toujours pas logées à la même enseigne. À compétences et à travail égal, une salariée du privé gagnait en 2014 en moyenne 14% de moins de l'heure que son confrère masculin. Certes, l'écart de rémunération à l'heure tend à se réduire : en 1995, il était encore de 16,8%. Mais si l'on se penche sur les revenus annuels perçus par femmes et hommes, c'est une autre histoire : alors qu'elles sont en général plus diplômées que les hommes, les femmes percevaient en 2013 un salaire inférieur en moyenne de 25% par rapport à eux, et ce quelle que soit leur profession.
L'écart salarial se creuse encore un peu plus pour les femmes cadres. L'étude de l'Insee pointe d'ailleurs un paradoxe : si les femmes sont aujourd'hui plus enclines à occuper des postes hiérarchiques plus élevés, elles sont en revanche de moins en moins nombreuses à travailler dans les secteurs d'activité les plus rémunérateurs. Ainsi, 13,4 % des femmes sont cadres en 2014, contre 7,4 % en 1995. En revanche, les cinq secteurs d'activité où les salaires moyens sont les plus élevés comptent 33,3 % de femmes parmi leurs salariés en 2014, contre 40,2 % en 1995. De même, les cinq secteurs d'activité où les salaires sont en moyenne les plus faibles emploient 53,9 % de femmes en 2014, contre 49,1 % en 1995.
Comment expliquer cette persistance des écarts salariaux et la trop faible présence de femmes aux postes les mieux rémunérés ? Pour les chercheurs de l'Insee, les causes sont multiples. D'abord, ils pointent de véritables "ségrégations sectorielle et socioprofessionnelle" qui entravent la carrière des femmes. Lorsqu'elles choisissent d'avoir des enfants, les mères actives auraient tendance à choisir des emplois moins bien rémunérés, mais qui leur permet de concilier leur vie professionnelle et leurs impératifs familiaux. Elles sont aussi plus nombreuses à arrêter de travailler : avec un enfant, le taux d'activité des femmes est de 86,3%, contre 95,7% pour les hommes. Dans un foyer de trois enfants, le taux d'activité des hommes reste pratiquement inchangé, tandis que celui des femmes dégringole à 64.2 %.
Autre inégalité dont les femmes actives pâtissent dans leur carrière : la moindre reconnaissance de leur expérience professionnelle. D'après l'étude, celle-ci contribue à près de la moitié de l'écart inexpliqué : l'expérience accumulée par les femmes est moins valorisée que celle des hommes, toutes choses égales par ailleurs. Cet écart de valorisation est le signe de carrières salariales plus plates chez les femmes que chez les hommes. Il pourrait s'expliquer en partie aussi par une moindre valorisation de l'expérience professionnelle à temps partiel, plus fréquente chez les femmes que chez les hommes, que de celle à temps plein. Autant dire qu'avant que femmes et hommes se voient versés le même salaire pour le même travail fourni, il faudra sans doute encore attendre longtemps.