On ne connaît que trop bien le goût prononcé du rappeur Booba pour les clash, plus encore quand ils se déploient sur Twitter ou Instagram, parfois simplement au détour d'une story. Des attaques véhémentes à travers lesquelles l'artiste n'hésite pas à tacler ouvertement ses "rivaux" artistiques, dans un grand exercice de virilité mal placée.
Et il semblerait que même ses auditeurs les plus fidèles en aient un brin ras la casquette. On les comprend. Le 14 janvier, Booba a ainsi publié sur Instagram un post des plus virulents à l'encontre de chanteurs et auteurs à succès comme Gims, Orelsan et... Stromae. Et ce en réaction à la performance remarquée de l'artiste belge sur TF1, interprétant en plein JT sa chanson L'Enfer dans laquelle il évoque sa dépression.
"On s'en bat les couilles de ta vie. Tu nous sers à quoi ? On t'a pas attendu pour déprimer. Le monde entier est en train de couler. Va prendre tes cachetons et reste au lit", a décoché Booba, qualifiant de Stromae de "grosse merde gonflée au Xanax". Un argumentaire solide comme il faut qui a suscité de vives réactions sur les réseaux.
"Apaise ton âme vraiment, c'est scandaleux, je unfollow obligé", "Le gars confond déprime et dépression. Ça sent le gros complexe, toi aussi tu peux pleurer tu sais ?", "Je ne le souhaite à personne, mais si la dépression touche quelqu'un de ta famille ? Ta fille ? Ta mère ? Tes propos seraient-ils les mêmes ? J'en doute. Avant d'être un rappeur t'es censé être un être humain", "Stromae est un artiste complet et ça c'est dur pour les rageux, je compatis", ont ainsi commenté certains fans déçus sur la page Instagram du rappeur français.
"Vrai bonhomme se bat et casse des bouteilles de parfum, faux bonhomme se confie sur ses failles. La masculinité toxique a encore de beaux jours devant elle", a ironisé l'autrice Sophie Gourion sur Twitter. D'aucuns soulignent aussi le caractère discriminatoire et psychophobe de ces propos. Effectivement, Booba cherche à décrédibiliser la dépression en la qualifiant de simple "déprime". De plus, le rappeur s'exerce à faire culpabiliser Stromae, comme si la démarche de celui-ci (ouvrir la parole sur un tabou de santé mentale) était purement égoïste.
Par-delà la psychophobie (pour rappel, l'oppression et la stigmatisation systémique sont victimes les personnes souffrant d'un trouble psychique), on reconnaît dans ce clash une caricature du traitement encore bien trop réservé à la dépression : l'euphémiser, faire porter son poids sur les personnes concernées, remettre en doute le vécu de ces dernières, voire carrément, ne pas considérer du tout la dépression comme une pathologie.
L'inverse de la démarche cathartique de Stromae donc - initiative par ailleurs validée par l'OMS, excusez du peu. Il faut le comprendre, dans l'esprit de Booba, la dépression n'est simplement pas un truc de "vrai bonhomme".