Apprendre aux enfants à jouer différemment pour leur permettre de penser différemment : voilà le beau projet que s'est fixée la compagnie multimédia GoldieBox, connue pour ses jeux de constructions techniques dédiés aux filles, en lançant la chaîne Youtube "Toy Hackers". En montrant aux filles qu'elles peuvent parfaitement se servir d'un tournevis ou construire des robots, cette émission lutte contre les discriminations de genre, auxquelles les enfants sont encore bien trop souvent exposés par l'intermédiaire de jeux stéréotypés. On ne peut qu'applaudir !
Le concept de l'émission est simple : des Youtubeuses junior, réunies sous le nom de la "Toy Hackers Secret Society", donnent à des figurines d'action des "missions". Elles doivent résoudre des problèmes de la vie de tous les jours grâce à de nouvelles inventions.
En plus de la partie narrative et humoristique, chaque épisode comprend un tutoriel pour réaliser pas à pas les créations présentées dans l'émission. Dans les deux premiers épisodes, les petites bricoleuses apprennent à fabriquer des enceintes maison, et un système de poulie pour attraper des choses à distance (vous ne pourrez plus rien cacher en haut de vos étagères...). Toutes les inventions peuvent être construites avec des objets de la vie courante comme par exemple avec des billes, des rouleaux de papiers toilette et des gobelets en plastique, afin que les enfants puissent les réaliser simplement.
Le but est d'apprendre aux petites filles à poser un regard différent sur le monde qui les entoure, de leur apprendre qu'elles ont les capacités de le transformer, de le modeler selon leur volonté. Une jolie initiative d'empowerment pour redonner confiance aux filles et leur permettre d'exploiter leur créativité.
L'émission, diffusée sur Youtube, sera présentée par la bloggueuse vidéo Simone Giertz, la très sympathique "reine des robots bizarres", comme elle se surnomme elle-même. Elle s'est fait connaître en construisant et en testant toute sortes de robots improbables sur sa chaîne Youtube. C'est, entre autres, l'inventrice d'un robot-réveil qui vient gifler son propriétaire pour le faire émerger, d'un robot applicateur de rouge à lèvres peu délicat, d'un assistant à shampoing, ou d'une machine qui tartine tout de beurre de cacahuètes, à l'exception des tartines.
Elle explique au New York Times que "Toy Hackers" veut promouvoir le bricolage, la construction et plus généralement, tout ce qui touche à l'ingénierie, pour développer chez les filles un goût pour ces domaines dont elles demeurent encore très exclues. Ce type d'occupations ne leur ait quasiment jamais proposé, ce qui les conduit à développer un complexe par rapport aux garçons dans ces disciplines : elles se mettent en tête que ce n'est pas quelque chose pour elles, qu'elles ne peuvent pas y arriver. Résultat sur le long terme : seuls 28% des ingénieurs sont des femmes, d'après le site Digischool. Et les domaines scientifiques et techniques demeurent également de véritables déserts de femmes.
"L'ingénierie demeure un domaine tellement, tellement déséquilibré au niveau des genres", a confié Simone Giertz au site Fortune. "On apprend aux petites filles à faire attention, et je pense que dans beaucoup de cas, c'est un énorme frein", dit-elle. La jeune femme de 25 ans explique d'ailleurs qu'elle n'a appris à coder qu'à 22 ans parce qu'elle avait trop peur de l'échec. Et il est vrai que dès qu'une petite fille touche un outil, elle récolte une moisson de commentaires réprobateurs et de "Lâche ça, ma chérie, tu vas te blesser". Et ce sont ces préjugés sexistes inconscients qui handicapent les femmes et les poussent à déserter les champs de la technique, de la science ou de l'ingénierie.
C'est là tout l'intérêt de "Toy Hackers" : l'émission développe ce goût du bricolage chez les petites filles, tout en leur fournissant des modèles féminins qui réussissent dans ces domaines saturés en testostérone. "Il y a une grande différence quand quelqu'un est du même genre que vous. Ça vous aide à vous débarrasser de ces préjugés du 'Je ne peux pas faire ça'", confirme Simone Grietz. Et c'est sans aucun doute une belle victoire, car c'est de confiance dont les femmes manquent. Pas de capacités.