Husnah Kukundakwe n'a que 14 ans. A Tokyo, elle est cette année la plus jeune participante aux Jeux paralympiques, ce qui est déjà un joli record. Mais ce n'est pas la seule qualité exceptionnelle de la nageuse ougandaise. L'adolescente, née sans avant-bras droit et avec une malformation de la main gauche à cause d'une déficience congénitale, brille dans son domaine, la natation. Au sein des World Para Swimming World Series notamment, il y a deux ans, la paranageuse a aussi bien excellé dans le 100 mètres brasse que dans le 100 mètres nage libre.
La nage n'a donc plus aucun secret pour elle, malgré son jeune âge. Et aujourd'hui, médiatisée de par sa première participation aux Jeux paralympiques, ce ne sont pas seulement les exploits sportifs qu'elle désire valoriser. L'athlète souhaite plus encore inspirer les futures générations de sportives en situation de handicap et visibiliser des enjeux de société capitaux - qui ne sont pas encore suffisamment mis en lumière.
Si elle n'est finalement pas parvenue à la finale de sa compétition, voir Husnah Kukundakwe disputer l'épreuve du 100 mètres brasse aux Jeux paralympiques de Tokyo a largement suscité l'enthousiasme. La joie, oui, mais pas l'étonnement. Car l'athlète est motivée depuis des années déjà. Elle est l'incarnation même de la persévérance.
Comme le relate le site officiel des Jeux paralympiques, Husnah Kukundakwe a commencé à nager à l'âge de trois ans et s'est initiée aux cours deux ans plus tard à l'école Sir Apollo Kaggwa, en Ouganda. Ses prémices olympiennes sont donc le résultat de quasi dix ans de travail acharné, à raison de treize heures d'entraînement par semaine en moyenne. "Au début, j'ai commencé à nager pour m'amuser, jouer dans l'eau. Ensuite, j'ai regardé mon cousin qui nageait lors d'un gala à l'école. Il nageait si vite. Par la suite, j'ai compris que la natation était le seul sport que je pouvais gérer. Ensuite, j'ai commencé à faire de la compétition", y raconte-t-elle.
Dit comme ça, le parcours de la jeune femme semble couler de source. Mais cette sereine traversée n'a pas toujours été si rose, loin de là. Petite, à l'école, Husnah conserve un pull toute la journée, même quand la chaleur l'accable, pour cacher autant que faire se peut son handicap. En plus de sa timidité naturelle, elle doit subir le regard de ses camarades et plus encore, leurs moqueries virulentes. "Ils me regardaient fixement. Certains riaient. Une fois, je me suis vraiment mise en colère et je suis rentrée chez moi", témoigne-t-elle encore.
La natation sera une découverte véritablement libératrice pour elle. "Quand j'ai commencé à nager, les gens ont commencé à me connaître et j'ai peu à peu perdu cette timidité. J'ai retiré le pull, je l'ai oublié et j'ai fini par me déplacer en étant heureuse, pas timide. La natation m'a rendue plus confiante", poursuit la native d'Afrique de l'Est.
Et c'est fort du parcours qui fut le sien que Husnah Kukundakwe prend aujourd'hui la parole. A l'AFP, la jeune femme assure tenir, de par sa posture, une certaine responsabilité médiatique. Celle de contribuer à la visibilité des personnes en situation de handicap en Afrique, et notamment en Ouganda, où les bébés nés avec un handicap sont souvent abandonnés. "L'Afrique en général doit apprendre que les personnes avec un handicap sont des gens normaux, et ils ont le droit de faire ce qu'ils veulent faire", déclare celle qui dit admirer la paranageuse néo-zélandaise Sophie Pascoe, grande habituée des Jeux paralympiques d'été.
"Peut-être qu'en donnant une chance à ces enfants en situation de handicap, lorsqu'ils voient qu'ils sont différents des autres et qu'ils réalisent qu'ils veulent faire quelque chose, le sport peut les aider à augmenter leur confiance", a-t-elle poursuivi du côté de France 24. "Mon arrivée aux Jeux paralympiques démontre que je progresse et cela me donne envie de poursuivre jusqu'à obtenir une médaille".
Les Jeux, une finalité ? Pas du tout. Pour Husnah Kukundakwe, ce n'est "que le début du voyage".