Une étude de l'Unicef datant de 2015 révèle une réalité terrible : plus de la moitié des adolescentes sri lankaises interrogées ne voulaient pas ou n'étaient pas autorisées à aller à l'école pendant leurs règles, tandis que 37 % manquaient un ou deux jours d'école chaque mois.
Pour la plupart d'entre elles, la peur des taches, la douleur et l'inconfort étaient les principales raisons de cette abstention. A noter que parallèlement, seulement 30 % des 4,2 millions de femmes en âge d'être menstruées ont accès à des protections périodiques, ces produits n'étant pas jugés comme de première nécessité dans le pays d'Asie et lourdement taxés.
Aujourd'hui, le gouvernement souhaite agir concrètement. Son plan d'action : fournir des serviettes gratuites et fabriquées localement à 800 000 écolières, puis construire des toilettes dans 2 500 établissements scolaires. Un projet qui visera en priorité les zones rurales, d'autant plus touchées par la précarité menstruelle. Mais qui, selon certaines, n'est pas tout à fait suffisant.
"C'est un grand pas, selon la façon dont nous le mettons en oeuvre", commente auprès du Guardian Nayanathara Jayathilaka, une étudiante assistante sociale de Galkiriyagama, village situé à 160 km de la capitale Colombo. Elle insiste sur l'urgence de la situation : "J'ai récemment parlé à dix filles du village. Cinq d'entre elles n'ont jamais utilisé de serviettes hygiéniques. Elles utilisent de vieux chiffons".
Des alternatives extrêmement dangereuses. Une pauvre hygiène menstruelle peut ainsi provoquer de graves infections, et être à l'origine de conditions sanitaires dramatiques, comme le cancer du col de l'utérus, par ailleurs le deuxième cancer le plus répandu chez les Sri Lankaises.
Mais ce qui pousse également les jeunes filles à manquer les cours, c'est la stigmatisation qui entoure ce processus biologique. Un tabou perpétué notamment par le corps enseignant, puisque 60 % d'entre eux et elles estimeraient que le sang des règles est impur, révèle encore le quotidien britannique.
Koshala Dilrukshi, prof d'anglais dans le village de pêcheurs de Uswetakeiyawa, admet qu'elle finit par acheter elle-même les protections pour ses élèves : "Si vous prenez dix filles dans ma classe, huit d'entre elles n'ont pas les moyens d'acheter des serviettes hygiéniques. Les deux autres n'achèteraient pas de serviettes parce qu'elles sont timides." Elle l'affirme : au-delà de mettre ces produits à leur disposition, il est essentiel de sensibiliser les filles comme les garçons aux menstruations, et d'enfin rompre cette culture de la honte nourrie par des non-dits ravageurs.
Un avis que partage l'étudiante assistante sociale Nayanathara Jayathilaka tout comme le collectif Arka Initiative, qui oeuvre pour une meilleure prise en charge des besoins en matière de droits reproductifs et d'éducation sexuelle. Tarangee Mutucumarana, l'une de ses membres, épingle également le temps qu'il aura fallu au gouvernement pour agir.
"En tant que pays, la distribution gratuite de serviettes hygiéniques aux écoliers aurait dû être mise en oeuvre plus tôt. Nous sommes en retard mais mieux vaut tard que jamais", lance-t-elle dans les colonnes du média. Et conclut en insistant : "Nous devons réaliser que l'accès aux produits d'époque est une nécessité de base, et non un luxe." Des mots essentiels qui font aussi écho de ce côté de la planète.