En France, plus d'1,7 million de femmes sont concernées par la précarité menstruelle, selon l'Ifop. L'association Règles Elémentaires estime que ce chiffre est passé à deux millions en 2020. Ce sont autant de personnes qui n'ont pas les moyens de se procurer les protections périodiques indispensables à leur hygiène intime, ou pas assez, et qui craignent de lourdes conséquences physiques et psychologiques. Un fléau sanitaire contre lequel se battent de nombreuses organisations féministes. Et qu'Emmanuel Macron a mentionné lors de son interview auprès de Brut, le 4 décembre dernier.
Interpellé par le média sur la récente décision de l'Ecosse de rendre gratuits ces produits de première nécessité, et interrogé sur la position de la France, il a répondu avoir demandé à "avancer" sur cette question urgente.
"Quand on voit des femmes qui sont dans la très grande précarité, qui sont à la rue, elles vivent tout ce que vit un homme, d'épuisement physique, de réduction de votre durée de vie, de maladies qu'on contracte, d'humiliation, et elles vivent en plus deux choses", a ajouté le président de la République. "En effet la précarité menstruelle, le fait d'avoir des règles dans la rue et de ne pas pouvoir acheter de quoi se protéger et de quoi être digne dans la journée, et puis le viol", a-t-il détaillé. "Et donc ça, c'est une action sur laquelle je veux qu'on renforce le travail avec les associations, les services sociaux, les communes".
Une déclaration à laquelle ont réagi La Fondation des Femmes, le collectif Georgette Sand et Règles Elémentaires, affirmant l'avoir trouvée "bienvenue", se réjouissant que le terme soit employé, et le sujet abordé, par le chef de l'Etat. Seulement maintenant, elles appellent à "passer aux actes". Et lancent : "Pour éviter de demander des protections hygiéniques au Père Noël, demandons-en au gouvernement".
Dans un communiqué en réaction à ses propos daté du 11 décembre, elles expliquent ainsi qu'une "politique volontariste en la matière pourrait améliorer la situation et permettre à toutes les femmes de vivre leurs règles dans la dignité". Elles listent alors plusieurs "actions concrètes" que le gouvernement a les capacités de mettre en place rapidement.
D'abord, la "mise à disposition de protections réutilisables, serviettes hygiéniques, tampons dans tous les lieux qui accueillent des femmes en situation de précarité" (centres d'hébergement, accueils de jour, centres sociaux, centres de protection maternelle et infantile, prisons et autres lieux de privation de liberté, permanences d'accès aux droits, centres d'accueil pour demandeur·ses d'asile, hôpitaux, maternités...) mais aussi "dans les lieux qui accueillent des jeunes femmes et adolescentes" (établissements du secondaire, clubs sportifs, foyers de la protection de l'enfance...). Elles proposent par exemple "l'octroi d'un pack de serviettes réutilisables à toutes les collégiennes".
Ensuite, "l'interdiction de l'utilisation de composants toxiques dans la production de protections hygiéniques, et l'obligation, pour les fabricants, de révéler la composition de leurs produits pour protéger la santé des femmes", exigent-elles. Et enfin, un soutien renforcé aux associations de lutte contre la précarité menstruelle.
Dans un communiqué parallèle, l'association Règles Elémentaires demande quant à elle à ce que l'accès aux serviettes et tampons soit rendu obligatoire dans la loi, et étendu à un maximum de lieux publics (gares, rues, stations de métro) et privés (bars, restaurants) par le biais de distributeurs.
Elle requiert aussi la mise en oeuvre de programmes de sensibilisation au plus grand nombre, afin d'informer davantage les premières concernées, mais aussi de mettre fin à un tabou nocif, qui stigmatise les menstruations et contribue sévèrement aux inégalités de genre.
Alors, à quand de réels progrès ?