Société
On a visité la Cité audacieuse dédiée aux droits des femmes
Publié le 4 mars 2020 à 14:32
Par Pauline Machado | Journaliste
Pauline s’empare aussi bien de sujets lifestyle, sexo et société, qu’elle remanie et décrypte avec un angle féministe, y injectant le savoir d’expert·e·s et le témoignage de voix concernées. Elle écrit depuis bientôt trois ans pour Terrafemina.
Ce jeudi 5 mars, la Cité audacieuse ouvrira ses portes au public en face du Jardin du Luxembourg à Paris. On a fait le tour de cette ancienne école pour garçons transformée en lieu dédié au rayonnement des droits des femmes et de l'égalité femmes-hommes. Un joli pied de nez qui marque aussi l'inscription du combat féministe dans la pierre.
On a visité la Cité audacieuse dédiée aux droits des femmes On a visité la Cité audacieuse dédiée aux droits des femmes© Paul Blind
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C'est dans le VIe arrondissement de Paris, entre le Sénat et le Panthéon, que se niche la toute fraîche Cité audacieuse, dans un bâtiment solide datant de la fin du 19e siècle, et qui fut autrefois une école pour jeunes garçons. Aujourd'hui, il devient le premier lieu français dédié aux droits des femmes et à l'égalité femmes-hommes. Un projet qui "traînait dans les cartons depuis 2001 et qu'on a dépoussiéré", explique fièrement Anne-Cécile Mailfert.

La présidente de la Fondation des femmes, qui soutient financièrement les associations féministes engagées depuis 2016, décortique toute la symbolique derrière cette adresse fixe lorsqu'elle s'adresse aux journalistes venu·e·s la découvrir : "Être dans la pierre, et pas seulement dans la rue, nous permet d'asseoir nos combats. D'avoir, en quelque sorte, une chambre à soi, comme l'écrivait Virginia Woolf. Nos combats ont l'air souvent si précaires, nos victoires ont l'air souvent si fragiles. Avoir cet établissement physique fait du bien."

Elle nous confie que loger à quelques centaines de mètres de ces institutions de pouvoir est aussi une façon de "rappeler très régulièrement au gouvernement, mais aussi aux pouvoirs publics en général qu'on est là physiquement, qu'on ne bougera pas". Qu'il faut plus de moyens et d'actions concrètes, aussi ? On le devine lorsqu'elle évoque les "beaux discours" qui étouffent la cause des femmes.

L'intérieur de la Cité audacieuse, dans le VIe arrondissement de Paris. © Paul Blind
1000 m² pour se rassembler

Esthétiquement, l'intérieur a tout d'une start-up. On repère des postes de co-working en mezzanine, des couleurs pop, une inspiration industrielle et des meubles recyclés. On s'attend presque à trouver un babyfoot dans la cafétéria. Seulement au lieu de jeunes entrepreneur·se·s qui ont soif de succès commercial, la Cité audacieuse se destine à accueillir le grand public, les "porteur·se·s de projets" et quinze associations féministes qui se battent pour améliorer le quotidien des citoyennes. Parmi elles : Règles élémentaires, qui lutte contre la précarité menstruelle, le collectif 50/50, qui oeuvre pour l'égalité au cinéma ou encore En avant toutes !, qui a notamment mis en place un tchat pour les jeunes femmes victimes de violences conjugales.

"Il s'agit de travailler ensemble pour faire progresser les droits des femmes ensemble", assure Anne-Cécile Mailfert. "Il va y avoir une énorme mixité en termes de thématiques abordées."

A ses côtés sur l'estrade, Sylvie Pierre-Brossolette, présidente du Comité d'orientation de la Cité Audacieuse, énumère le programme à venir : une conversation autour des discriminations dans l'industrie musicale pour la Fête de la musique, de la situation des femmes en prison,"honteuse comparée à celle des hommes qui n'est déjà pas idéale", commente-t-elle, ou des mutilations sexuelles féminines. Elle garantit que toutes et tous sont les bienvenu·e·s sous la devise "Liberté, égalité, sororité". Pour s'informer, mais aussi se retrouver.

En bas, on trouvera ainsi un café associatif ouvert à tous·te·s six jours sur sept, un jardin "au carrefour de l'écologie et du féminisme" dans les mois à venir, mais surtout des conférences, des permanences d'assos spécialisées (juridiques, par exemple), des débats et parfois même des cours de danse ou de yoga. Tout ça sous l'oeil protecteur et républicain d'une Marianne repeinte en violet - couleur du féminisme oblige - qui trône en hauteur. L'étage est lui réservé aux bureaux des collectifs, aux salles de réunion et au studio d'enregistrement créé par La Poudre. Le podcast féministe de Nouvelles Écoutes mené par Lauren Bastide a souhaité mettre sa main à la pâte "pour permettre aux victimes de raconter leur histoire, afin qu'elles la partagent ou non". Reste à voir si elles désirent se livrer.

"Un mélange d'insolence et d'ambition généreuse"

A deux pas de la marelle qui décore l'ancienne cour de récré, Julie Gayet, marraine de la Cité audacieuse et ambassadrice de la Fondation des femmes, nous confie sa propre définition du terme, et pourquoi il colle si bien à l'initiative : "L'audace, c'est d'oser quelque chose au-delà de ses peurs et des préjugés." Anne-Cécile Mailfert ajoute quant à elle qu'il s'agit "d'un mélange d'insolence, d'ambition généreuse. Le fait de croire qu'on peut réaliser des grandes choses. Le terme est suffisamment large pour que chacune puisse s'y retrouver. Adèle Haenel qui décide de se lever de son siège et de partir de la cérémonie des César, ça aussi c'est de l'audace".

Quand on leur demande si tous les publics se retrouveront réellement dans cet endroit au coeur des quartiers aisés de Paris, Julie Gayet rétorque que le combat pour les droits des femmes mérite aussi un endroit qui soit beau, et pas uniquement de se mener à l'aide de bouts de ficelle dans une cuisine. "On espère que les choses qui vont se passer ici vont faire changer la société", conclut à son tour la présidente, pour qui il est nécessaire de "varier les usages [des lieux] afin de correspondre à la diversité du féminisme". Un discours qui pourra se concrétiser dès demain.

La Cité audacieuse ouvre ses portes le 5 mars 2020, au 9 rue Vaugirard, Paris VIe.

Mots clés
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