"Ici, les tabous n'existent pas". Dès la bio de son compte Instagram, Jenny, sexologue en formation et plume derrière Jenndisculte , annonce le ton. Elle alimente page qui se veut bienveillante, ouverte et qui invite à ne plus redouter de se renseigner ou de se confier sur ce qui incarne, aujourd'hui encore, un domaine emprunt d'une culpabilisation sournoise. C'est réussi.
"L'idée de faire ce métier a toujours été dans un coin de ma tête, mais faire un métier dans le milieu du sexe me faisait peur, honte", nous explique la jeune femme lorsqu'on l'interroge sur sa vocation. "C'est assez paradoxal non ?" Un sentiment qui n'a rien d'isolé, mais qu'elle a voulu combattre. "Jusqu'au jour où j'ai pris ma vie en main, et décidé de faire ce qui me faisait me sentir moi même : parler de sexe, et en faire mon métier ! Alors, en attendant d'être certifiée [en sexologie], j'ai décidé de partager sur ma page Instagram ce que j'apprend au cours de ma formation."
Sur le réseau social, on retrouve des illustrations éducatives, des informations, le tout avec un style pop soigné qui attire l'oeil et fait la marque de l'artiste. Jusque-là anonyme, Jenny répond aujourd'hui à nos questions à visage découvert. Elle aborde l'importance de l'éducation sexuelle, le sentiment de puissance au lit que lui confère celui d'avoir confiance en son partenaire, et la force de son imagination lorsqu'il s'agit de réveiller son désir. Échange.
Jenny : On parle de tout sur Instagram, alors pourquoi ne pas parler de la vraie vie ? La sexualité fait partie de chaque personne sur Terre, après tout. Quand je parle aux gens de mon (futur) métier, j'ai remarqué que la plupart avait une réaction différente que si je disais "je suis secrétaire". Un rire gêné, un étonnement ... Alors que c'est un métier comme un autre, qui les concerne aussi.
La vie et la société ont fait de la sexualité non reproductive un tabou. Par exemple, j'ai appris ce qu'était mon clitoris, et surtout, à quoi il servait à l'âge de 17 ans, et je sais que je suis malheureusement loin d'être la seule dans ce cas là. Parler de sexualité sur Instagram a pour but d'informer, d'éduquer, prévenir, et décomplexer toutes les fausses croyances qu'on a pu nous inculquer, malgré nous.
Apprendre sur la sexualité, c'est aussi apprendre à se connaître, à s'aimer tel·le·s que nous sommes, et non comme la société voudrait que l'on soit. En parlant de sexe d'une manière libérée, bienveillante, et sans tabous, on redistribue les cartes de l'éducation sexuelle. Enfin, on essaie.
J. : Pour moi, l'empowerment passe d'abord par notre liberté sexuelle : vivre sa sexualité comme on la souhaite, comme on la ressent, en avoir le contrôle tout en lâchant prise sans essayer de se ranger dans des cases prédéfinies. Le fait de pouvoir parler librement de sexe en étant une femme, dire que l'on aime ça, en débattre en société, nous apporte une certaine puissance que l'on acquiert petit à petit. Malgré tout, c'est un concept qui a ses limites, qui disparaîtront un jour je l'espère ...
Qu'on se dise la vérité, une femme qui parle de sexe ouvertement est vite considérée comme vulgaire, pour rester très polie. Je vous lance le défi de trouver un mot positif qualifiant une femme qui aime le sexe, qui aime en parler, ou le pratiquer régulièrement.
J. : Sans hésitation, le Womanizer. Le design est sobre et élégant, l'utilisation simple à comprendre, et je ne vous ferai pas un dessin, niveau efficacité, il m'épate comme au premier jour, et ça fait deux ans que ça dure !
J. : Je ne regarde pas spécialement de films porno, mon imagination fait bien mieux le taf ! J'en ai vu pas mal, mais aucun n'a égalé mon petit cerveau qui sait mieux que n'importe quelle vidéo ce qui m'excite le plus. Pour ceux et celles qui sont à court d'idées et qui ne veulent pas regarder de porno, je conseille les pornos audio. On nous donne une base et notre imagination se charge du reste : topissime !
J. : Le fait d'avoir le choix de dire stop à tout moment. Me sentir en confiance avec mon partenaire me donne un sentiment de puissance qui me fait savoir que je peux tout m'autoriser.
J. : Mon fantasme d'adolescente qui reste malgré les années qui passent : Ian Somerhalder (en vampire, évidemment).
J. : Pas de mot : le regard. Il révèle des sentiments, des émotions, des pensées, que même des mots n'arriveraient pas à exprimer.
J. : Être en accord avec soi-même sexuellement, s'assumer, et par-dessus tout, s'aimer, est la première des choses à faire. Au-delà de ça, il ne faut pas avoir honte de donner son avis sur des sujets autour de la sexualité, que ce soit avec des proches, en société, en milieu professionnel... C'est parfois de cette manière qu'un débat, une discussion va se lancer et lancer les autres qui n'auront pas osé le faire.
Votre opinion, votre expérience pourront donner une vision différente de celles des autres. Si j'ai un conseil à partager qui m'a beaucoup appris, notamment sur moi même, c'est le suivant : osez en parler comme si c'était un sujet banal, car c'est un sujet banal.