Palme d'Or, Oscar du meilleur scénario, César du meilleur film, de la meilleure réalisation... On ne compte plus le nombre de prix récoltés par le phénomène Anatomie d'une chute, revisite à la française du film de procès, genre davantage exploré outre atlantique. Mais tout cela n'empêche pas sa cinéaste, Justine Triet, de penser aux grandes absentes des festivals.
Parmi ces voix dont le silence résonne lourdement durant ces cérémonies, la plus emblématique de toutes : Adèle Haenel, comédienne de cinéma, et de théâtre (chez Gisèle Vienne actuellement), militante féministe, partisane du "On se lève et on se casse", soeur de lutte d'Aissa Maiga et Virginie Despentes... Son nom, une actrice comme Judith Godrèche l'a volontiers prononcé ces dernières semaines, notamment lors des César.
Et Justine Triet, elle aussi, a décidé de le raviver. Sur les ondes de France Inter, elle affirme sans détour : "Judith Godrèche, après Adèle Haenel, disent des choses essentielles, nécessaires. On a mis plus de temps à y arriver en France mais on y arrive, on vit vraiment le #MeToo aujourd'hui..."
Justine Triet en a également profité pour évoquer la protagoniste complexe et ambiguë de son immense succès, Sandra (incarnée par Sandra Huller) : "Ca m'a surpris qu'en France tout le monde la croit innocente, et aux États-Unis, tout le monde la croit coupable. En Espagne, on m'a dit que cette femme était "très détestable"..."
"Ca dit quelque chose de la culture de chaque pays ! Alors que la façon dont Sandra est incarnée est très féministe, c'est quelqu'un qui est tellement décomplexée dans sa façon de ne pas demander ce qu'elle veut mais de l'imposer...". Un point de vue intéressant, que nous développons ici !
Anatomie d'une chute, un film sur la parole des femmes ? De quoi rappeler ces mots d'Adèle Haenel, décochés dans une tribune offerte par Télérama : "Ça [en incommode certains], ça les dérange, que les victimes fassent trop de bruit, ils préféraient qu'on continue à disparaître et crever en silence"
Une prise de parole qui avait été soutenue par Garance Marillier. La jeune actrice de "Grave" et "Marinette" n'avait pas caché son profond respect pour la Jeune fille en feu : "Je suis admirative de sa parole, ses combats. C'est quelqu'un qui est aligné avec ses combats, qui va au bout de ça".
CQFD ?