Connaissez-vous l'émission "Le Book Club" sur France Culture ? Elle nous invite régulièrement à découvrir la bibli de personnalités singulières et stimulantes. Pas si étonnant alors de voir le dernier épisode, toujours animé par Marie Richeux, mettre à l'honneur une actrice et icône féministe : Adèle Haenel.
La jeune militante, coeur du cinéma de Céline Sciamma (Naissances des pieuvres, Portrait de la jeune fille feu) tout autant remarquée pour son intensité que pour son feeling comique (chez Pierre Salvadori) et son rapport instinctif au réel (les frères Dardenne l'ont bien compris) s'est donc exprimée dans ce club de lecture radiophonique forcément sororal.
Au sein de sa bibli ? L'on retrouve des paroles fortes, engagées et plurielles, et évidemment, toutes révoltées à leur manière... De quoi prendre des notes avant de se rendre dans notre librairie préférée, et fissa.
Adèle Haenel a choisi d'évoquer le roman Mon coeur à l'étroit de Marie Ndiaye, l'essai Défaire voir de Sandra Lucbert, la réflexion Le contrat racial de Charles Wade Mills, le manifeste et étude Femme ! Vie ! Liberté ! Echos d'un soulèvement révolutionnaire en Iran de Chowra Makaremi, ainsi qu'un poème de Refaat Alareer : "S'il est écrit que je dois mourir".
Défaire est une nouveauté de la rentrée littéraire puisque ce texte de "Littérature et politique" est paru en janvier aux éditions Amsterdam. Là où le manifeste du philosophe Charles Wade Mills nous renvoie à 1997 !
Philosophie sociale et politique, littérature, portrait de femme chez la romancière française Marie Ndiaye, fiction... La sélection est très polyphonique ! "Pour moi, Sandra Lucbert est l'une des plus grandes autrices contemporaines, à la fois en littérature et en théorie", assure Adèle Haenel, qui complimente également Marie Ndiaye, "autrice majeure, extrêmement puissante, dont le roman est extrêmement beau et émouvant".
Le nom de Refaat Alareer vous est peut être inconnu ? Il s'agit d'un poète palestinien, décédé en décembre dernier. Il était également professeur et activiste. Adèle Haenel dit de sa plume qu'elle est aussi intime que politique. On l'écoute : "Il ne peut pas y avoir un silence autour de ce qui se passe à Gaza. Donc, je voulais donner une voix pour lutter contre ce silence épais"
"Toutes ces vies comptent !"
Quant à l'autrice française d'origine iranienne Chowra Makaremi, dont le manifeste est à retrouver du côté de La Découverte, elle est également anthropologue, chercheuse au CNRS et réalisatrice. Son essai foisonnant s'est vu couronné du Prix de l'essai France Culture - ARTE 2023.
"Lire un extrait du texte de Chowra Makaremi, c'est parler de la révolte des femmes iraniennes, un mouvement d'émancipation qui a été une inspiration très forte pour toutes les féministes du monde entier, parler de toutes les personnes qui se sont soulevées, qui ont participé à ces mouvements, et montrer qu'elles ont insufflé un souffle très puissant aussi bien de courage politique que d'intelligence théorique"
Un panel impressionnant pour la journaliste Marie Richeux, qui commente : "A travers les livres, il est possible de parler de soi et du monde, de soi dans le monde, du monde en soi. Les lectures qu'Adèle Haenel a choisi de nous faire partager font apparaître les autres et le monde."
On a pu voir l'actrice dirigée au théâtre par Gisèle Vienne dans L'Étang (2021) et Le Voyage sans Fin (2022). Et c'est encore sur les planches et auprès de cette metteure en scène et chorégraphe féministe qu'Adèle Haenel, retraitée du grand écran, fait son retour aujourd'hui. On peut effectivement la retrouver à l'affiche du spectacle Extra Life, actuellement en tournée.