La toxicité des produits menstruels est un fait largement dénoncé. Des études ont déjà alerté sur les risques de "chocs toxiques" associés aux tampons, serviettes et aux coupes menstruelles. En 2018 déjà, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) alertait quant à la présence de perturbateurs endocriniens comme les dioxines, l'hexachlorobenzène et le quintozène, dans les protections périodiques vendues en France.
Aujourd'hui, une nouvelle affaire émerge. Elle vise les culottes menstruelles de la marque Thinx. L'entreprise basée à New York, qui s'autoproclame écoresponsable, sûre et éthique depuis sa création en 2013, s'est effectivement retrouvée devant les tribunaux. La raison ? La présence supposée de produits chimiques dans ses culottes menstruelles. Et plus exactement, de PFAS, acronyme employé pour désigner les per et polyfluoroalkylées.
Autrement dit ? Des substances chimiques durables, à la décomposition très lente, que l'on retrouve notamment dans les poêles en Téflon, mais aussi dans bien (trop) de produits du quotidien. Ce qui ne serait évidemment pas sans conséquences sur la santé. La Commission européenne a d'ailleurs présenté en avril 2020 un plan d'action visant à éliminer la PFAS, ainsi que "les substances chimiques les plus dangereuses pour la santé et l'environnement", des produits de grande consommation.
Des substances bel et bien présentes dans les produits menstruels de Thinx, alors que la marque avait nié ces accusations, affirmant que ses culottes sont "biologiques, durables et non toxiques". "Nous continuerons à prendre des mesures pour garantir que les PFAS ne soient pas intentionnellement ajoutés aux sous-vêtements Thinx à aucun stade de la production", a développé la marque dans sa défense.
Malgré tout, en conclusion de ce procès, l'entreprise a finalement été condamnée à dédommager les clientes à hauteur de quatre millions de dollars au total.
Aujourd'hui, les clientes se retrouvent logiquement dans une situation d'inquiétude. Auprès du Guardian, l'une d'elles, Giesdahl, qui achète ces culottes menstruelles depuis plus de cinq ans, témoigne : "Je suis déçue parce que j'aime ces produits et maintenant j'ai peur des impacts que les PFAS pourraient avoir sur ma santé, des conséquences que je ne connais pas encore, comme le cancer".
Des doutes d'autant plus alarmants que Thinx propose également une ligne pour les ados qui connaissent leurs premiers cycles menstruels. Et qu'un million de personnes utilisent les produits Thinx. Sur les réseaux sociaux, relate le Guardian, de nombreuses clientes s'interrogent : "Pourquoi est-il si difficile de trouver des produits menstruels sûrs ?". Et ironisent : "Rien de tel que de lire sur les conclusions du procès Thinx tout en portant une culotte Thinx".
"A cause de la stigmatisation menstruelle, la priorité de bien des clientes est de dissimuler leurs corps menstrués, et non de remettre en question les types de produits qu'elles utilisent. C'est une configuration parfaite pour que l'industrie profite de nous et exploite notre désespoir", déplore auprès du Guardian Chris Bobel, professeur d'études sur le genre et la sexualité à l'Université du Massachusetts à Boston
Une stigmatisation bien réelle quand l'on sait que le sujet des règles suscite ignorance et mépris en entreprise. Une étude de 2019 de l'entreprise britannique de produits d'hygiène Initial Washroom Hygiene, s'appuyant sur les propos de 2 000 employés de bureau, nous apprend ainsi que 32 % des salariés masculins jugeraient "peu professionnel" de voir leurs consoeurs discuter de leurs règles au sein de leur lieu de travail. La preuve d'un tabou qui perdure. Et des difficultés de prendre en considération la santé des femmes.
Les représentants de la marque Thinx n'ont pas encore répondu aux demandes de réponses du Guardian.