On vante souvent la teneur du lait maternel en vitamines, graisses, protéines, glucides et même bactéries essentiels au développement du bébé, mais il contiendrait également un cocktail dangereux de substances chimiques, d'après une étude récente .
"On est vraiment dans une situation absurde où les femmes doivent penser aux produits chimiques auxquels elles exposent leur enfant en les allaitant", déclare Philippe Grandjean, spécialisé en santé environnementale à la Harvard T.H. Chan School of Public Health qui a dirigé cette nouvelle étude sur les substances qui passent dans le lait maternel.
Philippe Grandjean et son équipe de chercheurs ont analysé le sang de 81 enfants nés sur les îles Féroé en 1997 et 2000 afin de déceler la présence ou non de substances perfluoroalkylées (désignés en anglais par les initiales PFAS, ndr), qui, en trop grand quantité, ne sont pas sans effets sur la santé. Or le taux de ces produits chimiques dans le sang augmentait de 20 à 30% dès que l'enfant était exclusivement nourri au sein et certains enfants avaient des niveaux plus élevés de perfluoroalkylés dans le sang que leur mère. Ce taux baissait systématiquement avec la fin de l'allaitement.
Si on savait déjà que certains composants chimiques pouvaient se fixer sur le gras qui compose le lait maternel, il s'avère ainsi que les protéines peuvent également servir de véhicules pour les toxines. En effet, les PFAS se fixent selon toute probabilité sur les protéines contenues dans le lait maternel. Philippe Grandjean ne cache pas son appréhension au sujet de la contamination du lait maternel par d'autres composants toxiques encore insoupçonnés, qui, comme les PFAS, se fixeraient sur les protéines. "Le fait que des nourrissons soient exposés à un si jeune âge à ces produits m'inquiète profondément", a-t-il déclaré.
Pour autant, ce spécialiste insiste sur le fait que les risques liés à la consommation de lait maternel sont moindres que les bénéfices, et qu'il ne s'agit donc pas de renoncer à l'allaitement.
Les PFAS sont utilisés dans de nombreux produits de consommation depuis des décennies. On les trouve aussi bien dans la composition des téléphones portables que des boîtes à pizza. Les recherches ont démontré qu'ils étaient liés au développement de cancers et de tumeurs.