Alors que les femmes continuent de percevoir un salaire en moyenne 26% inférieur à celui des hommes et que l'égalité salariale ne sera pas atteinte avant 2186, le gouvernement a enfin dévoilé son nouveau plan pour l'égalité professionnelle.
Présenté mercredi 7 mars en Conseil des ministres, il prévoit, a déclaré le Premier ministre Édouard Philippe, de mettre en oeuvre le plus rapidement possible l'égalité de salaire entre les femmes et les hommes, et ce "dans les faits" plutôt que dans de "belles déclarations juridiques".
Invitée ce jeudi 8 mars sur RTL pour la Journée internationale des droits des femmes, la secrétaire d'État chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes Marlène Schiappa est revenue sur les principales mesures annoncées.
C'est la mesure la plus retenue mais aussi la plus décriée : celle du déploiement à partir de 2019 d'un logiciel chargé de calculer les écarts de salaires dans les entreprises. Libre de droit, il sera en priorité installé dans les entreprises de plus de 250 salariés avant d'être généralisé à celles de 50 à 249 salariés d'ici 2020. Selon Marlène Schiappa, ce logiciel made in France aura la capacité d'"intégrer au calcul de paye les écarts de salaires entre les femmes et les hommes".
Si pour le moment, ce logiciel anti-inégalités est encore au stade de projet, certains partenaires sociaux s'inquiètent déjà de son manque de pertinence et d'efficacité. Dans un communiqué de presse, la CGT salue l'action du gouvernement qui, suite à "la mobilisation syndicale et féministe", a annoncé des mesures concrètes, mais souligne que "de nombreuses interrogations demeurent cependant sur la traduction effective de ces annonces qui comportent des lacunes majeures".
"Rien pour lutter contre la précarité des temps partiels, rien sur la parentalité ni sur les violences sexistes et sexuelles notamment", déplore ainsi la CGT. Concernant le logiciel chargé de calculer les écarts de salaires, le syndicat dénonce le tour de passepasse pour les abaisser de 26% à 9%. "Pas question que le logiciel se transforme en boîte noire, en ardoise magique des inégalités salariales et professionnelles, permettant de passer de 26 à 9 voire 0% d'écart de salaire ! Ce n'est pas seulement à poste égal qu'il faut raisonner, il est nécessaire de prendre en compte les temps partiels, les inégalités cumulées sur la carrière, la dévalorisation des métiers à prédominance féminine et la part variable de la rémunération", estime la CGT.
C'était une promesse de campagne d'Emmanuel Macron : systématiser les sanctions pour les entreprises où les inégalités salariales entre les femmes et les hommes persistent. Outre l'obligation d'utilisation du logiciel mesurant les inégalités, le gouvernement a annoncé le quadruplement des contrôles de l'inspection du travail en matière d'égalité salariale : ils passeront d'ici à 2022 de 7 000 contrôles par an pour les entreprises de plus de 250 salariés et à 30 000 pour celles de 50 à 249 salariés.
Parmi les priorités de ces inspecteurs, a déclaré Marlène Schiappa, se trouvera "le contrôle de résultats". "Actuellement, la loi prévoit une obligation de moyens. Nous, ce que nous voulons faire, c'est une obligation de résultats, et faire en sorte que les entreprises qui n'ont pas de résultats soient obligées de s'expliquer, et à terme soient sanctionnées." Cette pénalité financière pourra représenter jusqu'à 1% de la masse salariale des entreprises épinglées.
"La France doit reprendre une position de leader" sur la question de l'égalité entre les femmes et les hommes, a déclaré Marlène Schiappa. "Pour cela, nous créons une task force public-privé avec le Forum Économique Mondial co-présidée par deux ministres, Bruno Le Maire et moi-même, et par deux personnalités du monde des entreprises."
Composée de Bernard Arnault de LVMH, Christelle Heydemann de Schneider Electric, Bernard Michel de Gécina, Sophie Bellon de Sodexo, Nicolas Dufourcq de la BPI, et Sophie Errante de la CDC, cette task force élaborée en partenariat avec le Forum Économique Mondial a pour mission de favoriser l'égalité professionnelle, avec un espace de dialogue et d'échange entre secteur public et secteur privé. "On est le premier pays européen à créer cette 'task force', s'est félicitée Marlène Schiappa. Le but c'est d'expérimenter, d'innover, de faire tout analyser en temps réel par le World Economic Forum et par des chercheurs indépendants qui puissent nous orienter dans nos politiques publiques."