Rennes, une ville qui veille au bien-être temporel de ses habitants
Publié le 12 avril 2011 à 09:00
Par Alix Foriel
Rennes s’est doté d'un Bureau des Temps depuis 2002. Sa responsable Evelyne Reeves nous explique en quoi les politiques temporelles permettent de réduire les inégalités hommes-femmes, et quelles sont ses principales actions.
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Terrafemina : En quoi l'action du Bureau des Temps de Rennes s'inscrit-elle au cœur de la lutte contre les inégalités professionnelles hommes-femmes?

Evelyne Reeves : Les politiques du temps souhaitent aborder l’aménagement des temps comme un facteur de bien-être. Pour ce faire, elles examinent différents paramètres, notamment économiques. Ainsi, certaines femmes se sentent coupables de subir d’une double journée, donc elles prennent un travail à temps partiel qui impacte à terme le niveau de leurs retraites. Or ce n’est pas une question personnelle, mais un construit social, qui doit donc être traité à un niveau collectif. Les Italiens qui ont créé le concept de bureau des temps, sont les premiers à avoir dit que les femmes sont des "réservoirs de temps", par opposition aux maris gagne-pains. Quand les femmes ont investi le marché du travail, cette question du réservoir de temps a creusé les inégalités hommes-femmes. Même si les femmes françaises sont plutôt moins mal loties en termes de gardes d’enfants que celles du reste de l'Europe, celles-ci restent insuffisantes et elles conservent toujours cette fameuse double journée. Il fallait donc répondre à cette problématique de gestion du temps quotidien.

Tf : Le Bureau des Temps existe depuis 2002. Comment ont évolué vos actions depuis ?

E.R. : Au départ, nous avons cherché à harmoniser vie professionnelle et vie personnelle, en estimant que le temps est un levier pour lutter contre les inégalités. Nous avons par exemple mené une action en direction des femmes de ménages des services municipaux, afin qu’elles puissent travailler en journée. Puis nous nous sommes penchés sur la problématique du temps et des services publics, afin qu’ils s’adaptent aux horaires et aux rythmes des usagers. Par exemple, nous avons amélioré les horaires d’ouverture des piscines aux demandes des usagers, nous avons conservé certaines plages préférées des personnes âgées, et nous avons tenté d’y faire revenir les populations des quartiers.

Tf : Aujourd’hui vous travaillez sur la problématique du temps et de l’aménagement ?

E.R. : Oui, en même temps que nous avons évolué d’un positionnement ville à un positionnement métropolitain  qui concerne désormais environ 400 000 habitants. Il s’agit de penser la ville en termes de flux et de rythmes : comment développer l’habitat en fonction de ceux-ci ? Nous travaillons sur les zones d’activité et la proximité des équipements. Et puis, les 29 et 30 septembre prochains, nous organiserons un colloque sur la question du numérique avec 2 axes. D’un côté, le numérique qui favorise la gestion du temps. De l’autre, la dépossession de la maîtrise du temps induite par le fait d’être joignable à tout moment, et d’être susceptible de travailler en permanence.

Tf : Le Bureau des Temps à Rennes a développé une application unique qui s’appelle "Tic Tac le temps à la carte", expliquez-nous en quoi elle consiste.

E.R. : Il s’agit d’un outil disponible sur internet qui réunit des informations sur les 1500 principaux organismes de la ville de Rennes et la possibilité de recherche par créneaux horaires. La ville de Rennes est pour l'instant la seule collectivité à avoir ainsi croisé le temps et l’espace sur une application, afin de rendre disponibles aux usagers tous les services de la ville. C’est un outil prometteur, d’autant que Rennes est aussi l'une des premières villes françaises à avoir ouvert ses données publiques.

Tf : Est-ce que l'amélioration de la gestion du temps passe selon vous par une extension des horaires de certains services, par exemple en soirée, le samedi toute la journée voire le dimanche?

E.R. : Nous sommes opposés, depuis le début, à la ville 24h/24. Nos études montrent d'ailleurs qu’il n’y a pas de forte demande en la matière de la part des usagers. En revanche, nous favorisons les nocturnes ou les ouvertures du dimanche pour les services culturels et les loisirs publics, notamment en direction des jeunes.  Je pense notamment aux « Nuits des 4 jeudis » ouvertes jusqu’à 2 heures du matin pendant les beaux jours. Une nocturne par mois est consacrée aux sports (piscine ouverte, escalade…), une autre à l’opéra, une autre à des animations créées par des jeunes. Toutes ces manifestations sont gratuites, et nous ont permis de réguler les problèmes d’alcoolisme et de voisinage.

Tf : Une dernière initiative rennaise, les gardes d’enfants en horaires atypiques ?

E.R. : Cette offre a été conçue par l’association Parenbouge, et s’intitule « Parendom ». Il s’agit de répondre à des besoins de garde d’enfants 24 heures sur 24 en cas de maladie ou de rythmes de travail exceptionnellement décalés. Ainsi, certaines femmes agents d’entretien dans des zones d’activité étaient contraintes de faire dormir leurs enfants dans la voiture. J’imagine qu’elles devaient travailler la peur au ventre… Le prix de ce service, axé sur les faibles revenus, est sous conditions de ressources.

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