La main, Talk to me dans la langue de Shakespeare, c'est l'histoire d'une ado qui va s'adonner à d'étranges séances de spiritisme... Et le regretter très vite. Car si la main qu'elle empoigne auprès de ses camarades pour ce faire est factice, les forces démoniaques qui en émanent semblent quant à elles bien réelles.
Ne vous y trompez pas, rien d'un film d'exorcisme ou d'une énième production James Wan aseptisée ici. Non, mais un film d'horreur dont le nihilisme étoffé nous rappelle Les griffes de la nuit de Wes Craven. Nulle ironie dans ce cauchemar éveillé aux fulgurances très graphiques qui dénotent des habituels teen movies. Réalisé par deux frères jumeaux et YouTubeurs australiens, La main (d)étonne par sa noirceur assumée.
Mais si la vraie frousse était en dehors de l'écran ? Car aujourd'hui, cette production à rattraper en salles depuis le 26 juillet dernier se retrouve au coeur de la censure. La raison ? L'une de ses stars, trans et non binaire...
Effectivement, La main se voit privé de sortie au Koweit. Les citoyens de l'Etat du Golfe persique n'auront pas droit à leurs séances. Et tout cela par pure discrimination anti LGBTQ. Rien d'étonnant : on se rappelle notamment de la censure au sein de la déclaration d'amour lesbienne de Black Panther 2. L'angoisse.
Si vous avez vu le film d'horreur de l'été, la découverte de Zoe Terakes n'a pas pu vous échapper. Interprète trans et non binaire, Retakes, 22 ans seulement, y incarne Hayley, leader de la bande s'adonnant aux lugubres invocations - directement relayées sur TikTok !
Dans La main, Hayley est le temps d'une réplique désigné.e par le pronom de genre "iel", employé par les personnes non binaires - qui refusent de s'assigner à un genre déterminé, masculin ou féminin. Son apparence est androgyne. Tout aussi trouble, son caractère est ambiguë - suscitant peu l'empathie, assumant un côté "bully". Une caractérisation étonnante, puisque très peu consensuelle, pour une star non binaire.
Voir Zoe Terakes en second rôle marquant est une très bonne chose pour le cinéma de genre : la perspective d'un emploi différent des interprètes LGBTQ, et non-binaires, plus complexe, ambivalent, dans cette zone brumeuse qui sépare (de peu) les héros des anti héros. Et la star assure carrément. Hélas, certains pays se soucient peu de l'interprétation : les questions LGBTQ y sont clairement tabous.
C'est moins le personnage qui déplaît au Koweit, que la simple présence au casting de l'interprète. Une censure anti trans qui devrait fort logiquement s'étendre à l'Arabie saoudite, comme le rappelle BFM TV. Pas de doute, il y a bien plus inquiétant que les scènes pourtant bien chargées du film d'horreur...
Et Zoe Terakes de réagir : "Je ne suis pas une catégorie. Je suis une personne. Un.e acteurice trans qui a obtenu le rôle. Le Koweït a interdit ce film en raison de ma seule identité. C'est déchirant de comprendre ce que ce précédent signifie pour les personnes queer et trans du Koweït... L'élimination des acteurs trans sur les écrans n'éliminera pas les personnes trans mais cela éliminera beaucoup d'espoir !".