Une fois n'est pas coutume, cette cérémonie de clôture du Festival de Cannes fut forte en militantisme ! Lors de cette remise de prix animée par Camille Cottin, la Présidente Greta Gerwig a dévoilé aux côtés de son jury la teneur enthousiasmante de ses choix. Une remise de prix qui concilie art, intime et politique. Ainsi la Palme d'or a été remise au film Anora du cinéaste indépendant américain Sean Baker.
Pour le metteur en scène, extrêmement ému sur scène, ce récit d'une prostituée new-yorkaise est l'occasion de mettre en lumière les marginalités, de magnifier celles qui sont toujours mises de côté. Et il l'a rappelé avec son beau discours de victoire, après la remise de son prix par George Lucas : "Cette Palme d'or est pour toutes les travailleuses du sexe, passées, présentes et futures !". Les travailleuses du sexe, ou "TDS", sont régulièrement victimes de violences, de préjugés et de discriminations.
Mais c'est également un pan de la population, à l'unisson très stigmatisée, qui fut mise en lumière lors de cette cérémonie riche en surprises. Car en remettant le prix d'interprétation féminine aux quatre actrices de la comédie musicale Emilia Perez, signée Jacques Audiard, le jury est venu bousculer les lignes. Un prix collectif qui rappelle celui, d'interprétation masculine, remis au casting du film Indigènes.
Lauréate aux côtés de ses consoeurs Adriana Paz, Selena Gomez et Zoe Saldana, c'est l'actrice transgenre Karla Sofía Gascón qui est venue recevoir le précieux sésame. Elle est la première actrice transgenre à se voir sacrée par ce prix. Et a délivré, en larmes, un très puissant discours...
Un discours LGBTQ intense à deux pas du tapis rouge ? C'est ce que nous a offert la comédienne, avec une parole que l'on sentait bouleversée. Remerciant "l'équipe absolument incroyable du film, 200 personnes qui ont travaillé ensemble", l'actrice trans de 52 ans a décidé de dédier une partie de ce prix collectif "à toutes les personnes transgenres qui souffrent tous les put* de jours et sont dénigrées".
Ce sont des mots qui comptent dans une société meurtrie par la transphobie. En France, le nombre de violences commises à l'encontre des trans aurait augmenté de 27 % en un an, nous a appris SOS Homophobie. Outre-atlantique, le procès des assassins de Brianna Ghey, jeune fille trans tuée pour son genre, démontre à l'unisson la réalité de cette haine. Au Kenya encore, les femmes trans sont persécutées... "La transphobie n'est pas une opinion mais un délit puni par des sanctions pénales. Si votre cerveau est trop atrophié pour respecter l'humain, alors respectez au moins la loi", taclait récemment et à juste titre Enora Malagré.
"Plein de gens nous détestent juste parce qu'on existe. On entend tous les jours des insultes, on nous dénigre, la société essaie de nous diviser, je ne comprends pas pourquoi les gens se préoccupent de ce que l'on fait de nos corps, quel est le mal que je fais en existant ?", a d'ailleurs rappelé vivement Karla Sofía Gascón. Et la comédienne de conclure avec espoir, son Prix d'interprétation en mains : "Je pense que ce prix est une grande avancée !". Et un symbole puissant pour toutes celles qui n'osent pas s'exprimer.