Céline Antonin : Cette décision peut se justifier par le fait que la Grèce vient d'annoncer qu'elle n'atteindrait pas son objectif de déficit. Les membres de la zone euro ont besoin de temps pour réévaluer à la hausse l'enveloppe attribuée à la Grèce pour les 3 prochaines années, ou pour décider d'une autre stratégie à adopter au vu de l'enlisement actuel. Cela étant, le fait que la Grèce n'arrive pas à respecter ses objectifs de déficit pour 2011 n'est pas une découverte pour les dirigeants de la zone euro. Déjà, sur les 8 premiers mois de l'année 2011, le déficit public a atteint 18,1 milliards d’euros, soit 8,1% du PIB, alors que la Grèce s'était fixé un objectif de 16,7 milliards pour 2011 (7,4 % du PIB). Les dirigeants européens auraient donc dû réfléchir plus en amont sur la conduite à adopter, sachant que la Grèce ne pouvait pas, après trois années de récession, réduire son déficit aussi rapidement. Ce qui est à déplorer avec cette annonce, c'est que les marchés, qui n'aiment pas l'incertitude, vont demeurer très fébriles tant qu'une solution pérenne ne sera pas trouvée à la crise grecque.
C.A : La Grèce a adopté une stratégie fiscale de moyen terme, qui a été soumise au Parlement le 8 juin 2011. Cette stratégie vise à poursuivre l’effort de consolidation des finances publiques et présente un plan détaillé de mesures, représentant un montant de 28,3 milliards d’euros (soit 12 points de PIB) sur la période 2011-2015. A mon avis, ce plan est beaucoup trop ambitieux. Il prévoit par exemple 50 milliards d'euros de privatisations d'ici à 2015. Or vendre des entreprises dont la valeur a, dans certains cas, été divisée par 10 ne semble pas la meilleure solution pour renflouer les caisses de l’Etat. De même, l'objectif de remplacement d'un fonctionnaire sur 10 paraît très ambitieux. En revanche, il y aurait des marges de manœuvre sur le levier fiscal : la Grèce est minée par l'évasion fiscale, de la part des grandes entreprises avec un manque à gagner chiffré à 30 milliards d'euros, et de certains ménages. Je pense que c'est surtout sur cet aspect, ainsi que celui des réformes structurelles qu'il faut se concentrer, et non sur des mesures qui risquent d'accentuer encore la récession.
C.A. : La crise grecque a conduit à une baisse de l'euro face au dollar. Cela étant, la parité de l'euro était très élevée avec 1 euro équivalent à 1,4 dollar, donc il s'agit plutôt d'une correction, avec un euro qui reste fort à 1,3 dollar. La légère baisse de l'euro n'est pas une mauvaise chose, car elle permet de relancer nos exportations et de nous rendre plus compétitifs. En outre, les Etats-Unis ne sont pas dans une situation beaucoup plus enviable : ils ont également vu leur note souveraine dégradée cet été et ont des déficits bien plus élevés qu'en zone euro.
C.A. : Je ne suis ni optimiste ni pessimiste, mais plutôt réaliste. Je pense que quelle que soit la décision retenue pour la Grèce, elle doit intervenir rapidement et de façon concertée. Nous devons en finir avec ces atermoiements incessants qui ne font qu'aggraver la situation.
Crédit photo : AFP/Evangelos Venizelos, ministre grec des Finances
Grèce : Moody’s abaisse une nouvelle fois la note du pays
Dette : l’Assemblée vote le plan d’aide à la Grèce
La Grèce : les enjeux pour la croissance des pays européens
Dette grecque : le pays échappe à la faillite