Remontée, pour le pire, ou le meilleur ?
Difficile d'aborder le cinéma américain des années 80 sans évoquer l'un de ses plus grands et influents succès, Liaison fatale. Idylle passionnée mais sanglante entre un homme et une femme - on est assez loin de Claude Lelouch - permettant à Adrian Lyne de rappeler son goût pour l'adultère, les corps à corps fiévreux, le sexe et... Les bouleversements qui en découlent. On parle bien là de l'homme derrière Neuf semaines et demie. Loin du personnage de Kim Basinger, l'incroyable Glenn Close incarne dans Liaison Fatale une femme psychologiquement perturbée.
Qui de sa relation avec Michael Douglas va progressivement basculer vers des troubles de plus en plus nets - on se rappelle notamment de cette glaçante séquence de tentative de suicide, c'est même par là que tout débute. Oui mais voilà, bien qu'interprété avec une conviction tout à fait Oscarisable, le film en soi ne vieillit pas si bien que ça. Surtout sa fin, très moralisatrice, qui fait payer le prix fort à cette protagoniste - ne faisant, au fond, que rétorquer à la lâcheté du personnage de Michael Douglas.
Sauf que cette fin... n'est pas celle que l'on aurait du voir.
Qui dit sexe, dit sexisme ?
Dans le cas de Liaison fatale, véritable classique ayant cumulé six nominations aux Oscars, on s'interroge fortement. Car Glenn Close, ainsi que la presse américaine, nous apprend, non sans amertume d'ailleurs, que la fin initiale de cette love story tragique n'est pas du tout celle à laquelle nous avons droit depuis sa sortie en salles, il y a de cela près de quarante ans.
Effectivement, à l'origine, a déclaré Glenn Close en interview, son alias à l'écran, Alex Forrest, devait se suicider. Or, la fin de Liaison Fatale, telle que nous la connaissons, nous montre, de manière spectaculaire, Beth, l'épouse du personnage de Dan, homme marié "respectacle"... l'assassiner. Et ce dans une scène qui semble relever de la "légitime défense" (Alex est entrée par effraction dans le domicile et est armée d'un couteau). Une résolution choc. Mais comment expliquer ce revirement brutal ? C'est très simple.
C'est le public qui, lors des projections-test, c'est à dire, les séances organisées par les producteurs du film en comité réduit (et représentatif de la population américaine) afin d'attester ou non de la "qualité" de l'oeuvre, aurait exprimé son mécontentement concernant la fin de ce film. Une fin apparemment rejetée par l'audience. Pourquoi ? Car le personnage d'Alex ne "souffrirait pas assez". Comprendre : elle ne paierait pas assez pour ses actes, à savoir, le harcèlement du personnage masculin et de sa famille.
Les propos de l'actrice à ce sujet - recueillis par PEOPLE - sont dévastateurs : "Le public voulait croire que cette famille pourrait survivre, alors ils ont eu leur catharsis en versant mon sang". Difficile de ne pas voir là un relent de misogynie de la part de l'audience américaine. Ou comment souhaiter le trépas d'un personnage féminin véritablement plus fort, tenace, charismatique, que son partenaire masculin. Personnage menaçant certes, mais dont les troubles mentaux, évidents, n'ont pas vraiment suscité l'empathie du public.
Une belle démonstration de sexisme décomplexé, non ?
Glenn Close, elle, préfère se souvenir de l'intérêt qu'elle vouait au personnage, au plus profond d'elle. Car contrairement au public, elle s'est exercée à comprendre Alex. Même ses émotions les plus intenses et complexes. Ce qui a exigé beaucoup de travail. "Comme les recherches que j'ai pu faire avec des psychiatres", témoigne-t-elle à PEOPLE toujours.
Un investissement qui lui a permis de comprendre ce qu'est vraiment Alex : "quelqu'un qui se déteste... A l'image de beaucoup, beaucoup de personnes qui ont été abusées, qui finissent par se suicider et ne peuvent jamais avoir de relations épanouissantes". Une femme au passif dramatique, pour ne pas dire réellement traumatique, sans trop spoiler. Et la star de décocher : "Voilà c'était la femme que je jouais..., et ce serait merveilleux d'écrire ce genre d'histoire de son point de vue !". CQFD ?