Rachel Dolezal, l'activiste blanche qui s'est fait passer pour noire pendant des années

C'est l'histoire complètement folle qui fascine depuis quelques heures le monde entier actuellement sur les réseaux sociaux et la presse internationale : celle d'une femme blanche qui s'est fait passer pour une femme noire pendant près d'une décennie, avant d'être démasquée par ses parents.

Jusqu'à ce jeudi 11 juin, Rachel Dolezal, présidente de la section de Spokane (Washington, États-Unis) de la NAACP - National Association for the Advancement of Colored People, qui vise à aider et promouvoir les gens de couleur - était vue comme une activiste noire très engagée. Elle est également professeure d'études africaines à l'université d'Eastern Washington. Sa biographie sur le site de l'université nous apprend qu'elle a notamment enseigné des cours sur l'histoire de l'art africain et afro-américain, l'histoire africaine, la culture afro-américaine et les luttes des femmes noires. Le rôle des femmes noires dans la culture visuelle fait partie de ses spécialités.

Son CV s'étale ainsi sur plusieurs lignes et liste un paquet de beaux succès dans le domaine de l'activisme et des luttes contre le racisme et le sexisme. Que de très belles intentions, donc, là-dessus, rien à redire. Elle raconte par ailleurs que ses actions lui ont valu quelques représailles et qu'elle a subi les foudres de plusieurs groupes suprématistes blancs comme les Neo Nazis, le Ku Klux Klan ou encore les Aryan Nations. Elle raconte avoir été victime d'au moins huit crimes raciaux.

Et jusqu'à présent, elle n'était jugée que digne de soutien et d'admiration. Mais ça, c'était avant que ses parents fassent le choix de s'exprimer publiquement pour exposer son secret.

Les parents de Rachel Dolezal se sont confiés à BuzzFeed News sur la véritable identité de leur fille :

"Notre fille est caucasienne. C'est notre fille et nous sommes d'ascendance européenne", a-t-il dit. "Nous somme perplexes, et c'est très triste."

Pour accompagner leurs propos, et leur donner plus de poids, les parents de Rachel en ont profité pour diffuser des photos de leur fille avant sa "transformation", lorsqu'elle était plus jeune et très visiblement blonde et blanche.

Ils ont confié aux médias locaux que les origines de leur fille n'étaient pas du tout africaines mais plutôt tchèques, suédoises et allemandes.

Confrontée face caméra par des journalistes de la chaîne locale KXLY4, Rachel Dolezal perd complètement pieds. Lorsque le journaliste lui montre une photo de son père (qui est blanc, et non noir et absent comme elle l'avait raconté auparavant), Rachel le reconnaît en tant que tel mais semble se décomposer. Et quand on lui demande si elle est afro-américaine, elle répond "Je ne comprends pas la question", avant de prendre la fuite.

Il faut dire que Rachel avait déjà présenté son père à un événement de la NAACP en janvier dernier...

Toujours selon des propos rapportés par BuzzFeed, Larry Dolezal, le vrai père de Rachel, explique qu'il ne comprend pas ce qui a poussé sa fille à se faire passer pour une femme noire. Il tente de justifier ses actes par son engagement professionnel : "Depuis 20 ans, elle s'est assimilée au sein de la communauté afro-américaine au travers de son travail pour les droits civiques et la justice sociale, donc peut-être que ça explique ce désir en partie."

Pour aller plus loin encore dans l'imposture, la Spokesman Review rapporte qu'elle a également menti lors de sa candidature pour une commission municipale sur le travail de la police en décrivant son ethnicité comme "blanche, noire et indienne d'Amérique".

Sur les réseaux sociaux, même combat. Rachel s'exprimait très régulièrement et souvent en détails sur sa vie de femme noire, son point de vue d'afro-américaine sur des éléments de la culture populaire, son apparence...

Par exemple, elle a célébré son 36ème anniversaire en suivant le mouvement du retour aux cheveux crépus naturels.

Le site Jezebel s'est amusé à remonter ses vieux tweets pour en retirer quelques pépites.

On y trouve par exemple cette critique du film La Couleur des Sentiments.

"N'oubliez pas que La Couleur des Sentiments est une oeuvre fictive. Écrite en 2009, pas dans les années 60. Elle met 260 millions de dollars dans la poche d'une femme blanche."

En novembre 2013 sur Facebook, elle donnait également quelques conseils pour aller voir 12 Years A Slave au cinéma. Parmi eux : "Asseyez-vous dans le rang du fond pour éviter d'affronter sans arrêt les regards des blancs qui cherchent à scruter votre réaction de noir-e au film."

C'est en dénonçant un neuvième crime raciste envers elle qu'elle a attiré l'attention sur ses mensonges et que sa fausse identité a fini par être révélée. En février, elle raconte avoir trouvé un colis suspect dans la boîte postale de la NAACP, colis qui contenait des messages racistes et des menaces de mort.

Cependant, des employés de la poste ont signalé à la police que le colis n'était pas marqué d'un cachet postal, ce qui impliquait que le colis ait été déposé directement dans la boîte aux lettres soit par un employé de la poste, soit par quelqu'un qui en possédait la clé. Lorsqu'on lui a demandé des comptes, Rachel a assuré qu'elle ne mentirait jamais sur une chose aussi grave.

Les soupçons ont commencé à naître dans les esprits des gens ayant eu vent de l'histoire et tout le monde s'est mis à fouiller dans la vie et le passé de cette femme. Le Coeur d'Arlene Press a notamment soulevé un autre point perturbant : Rachel Dolezal parle souvent de ses fils noirs dans ses interviews. Là encore, le père de Rachel a démonté un énorme mensonge : le fils aîné de Rachel, Izaiah, est en réalité son frère adoptif, qui a choisi de vivre avec elle quand il avait 16 ans, il y a cinq ans.

Rachel Dolezal a également accusé son père d'avoir abusé d'elle et de ses frères et soeurs - des accusations que Larry dément. Elle avait aussi raconté être née dans un tipi, et que sa famille chassait à l'arc.

Plus on se plonge dans les détails de cette histoire, plus elle paraît folle. Et évidemment, elle n'a pas laissé grand monde indifférent. Un petit tour sur le hashtag #RachelDolezal sur Twitter vous le prouvera rapidement. À défaut de vouloir dire la vérité, du moins pour l'instant, Rachel est en train de devenir un véritable phénomène sur internet et nous ne sommes pas près de l'oublier.