Société
"Cela n'arrivera plus jamais" : les promesses d'hommes violents compilées dans un livre glaçant
Publié le 27 avril 2015 à 18:31
Par Marie-Laure Makouke
"Cela ne se reproduira plus", "Tu sais que je t'aime", "Tu es l'amour de ma vie"... Au Pérou, une association vient de publier un livre reproduisant une vingtaine de lettres d'amour et d'excuses envoyées par des hommes violents à leur compagne, avant de raconter la triste réalité qui a suivi la réception de ces messages. Un livre choc visant à faire réagir les victimes de violences conjugales.
L'ouvrage "No te mueras por mi" reproduit 25 lettres d'amour d'hommes violents L'ouvrage "No te mueras por mi" reproduit 25 lettres d'amour d'hommes violents© ThinkStock, iStock
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680 : c'est le nombre de femmes mortes sous les coups de leurs compagnons, au Pérou, au cours de six dernières années, selon les informations du ministère de la Femme et des Populations Vulnérables. De même, entre 2013 et 2014, le pays occupait la deuxième place du triste palmarès des femmes d'Amérique du Sud décédées des suites de violences conjugales, juste derrière la Colombie.

Une situation inquiétante et intolérable que l'ONG locale Vida Mujer a décidé de dénoncer à travers un livre choc. Intitulé No te mueras por mi (Ne meurs pas pour moi, en français) et préfacé par l'écrivain péruvien Mario Vargas Llosa (prix Nobel de littérature en 2010), il regroupe 25 messages (lettres, textos, mail) d'hommes violents à leur compagne ; des mots d'amour et d'excuse visant à faire oublier leur mauvaise conduite.


"Merci de me comprendre, de me permettre de jouir de ta présence"

"Je te jure que cela n'arrivera plus jamais. Tu es l'amour de ma vie. Pardonne-moi", supplie l'un des hommes. "Tu sais que je t'aime, même si je me suis trompé, cela ne se reproduira plus jamais", promet un autre, signant "celui qui t'aime le plus au monde". Un troisième use d'une autre stratégie, jouant sur la corde sensible de sa victime. "Merci d'exister, merci. Merci de me comprendre, de me permettre de jouir de ta présence, de me regarder avec ce visage si joli et me parler", écrit-il.

Cet ouvrage vise à encourager les femmes à quitter leur compagnon violent © http://www.notemueraspormi.com/

D'authentiques mots doux qui cachent une réalité qui l'est malheureusement beaucoup moins. Dans la majorité des cas, après avoir reçu ces messages et donner une nouvelle chance à leur bourreau, les victimes ont de nouveau été maltraitées.

"Ces 'Je t'aime, j'ai besoin de toi, je fais de mon mieux', plaisent à la femme qui est en souffrance. Ce sont de petites lueurs d'espoir, de bonheur et de plaisir. Sauf que le temps passe et que l'être humain continue de se conduire de la même manière", déplore Nelly Cancion, la directrice de Vida Mujer. Et de poursuivre : "Les femmes que nous recevons se retrouvent presque toutes face à un dilemme : rester avec leur compagnon bien qu'elles vivent une situation extrême ou le quitter. C'est ce qu'illustre le livre. Après les lettres vient la partie sombre de ce qu'elles doivent vivre".


Certaines sont décédées, d'autres ont perdu l'enfant qu'elles portaient

Un livre qui illustre le piège psychologique et le cercle infernal que constituent les violences conjugales. Il est divisé en deux parties. Ainsi, à la première qui reproduit les demandes de pardon en noir sur fond blanc, suit une autre section, qui en lettres blanches sur fond noir cette fois-ci, revient sur les mois ou années qui ont suivi la réception de ces fameux messages d'amour. Certaines, comme Raquel, sont en effet décédées sous les coups de leurs concubins quelques mois après avoir reçu une lettre d'amour. D'autres souffrent de multiples fractures et contusions causées par près d'une décennie de relations brutales, sont tombées dans le coma en raison des violences répétées qu'elles subissaient ou ont perdu l'enfant qu'elles portaient.

En publiant sur Internet ces lettres d'amour immédiatement démenties par la réalité, l'association espère créer un électrochoc et encourager les femmes à quitter leur compagnon violent en leur montrant qu'un homme ayant déjà levé la main sur elles est prédisposé à réitérer son geste.

À noter par ailleurs qu'après s'être ouvert en rappelant qu'"aucune société qui considère les femmes comme des citoyens de seconde zone, dans laquelle elles sont piétinées et maltraitées, ne sera jamais véritablement libre et démocratique", il se conclut en s'adressant directement aux potentielles victimes : "Si tu penses ressembler à ces femmes, n'attends pas de finir comme elles".

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