"C'était vraiment violent, sale, pervers". Il faut écouter Elisabeth, jeune étudiante strasbourgeoise de 22 ans. Sur les ondes de France Bleu, elle décrit l'agression dont elle a fait l'objet. Ce 18 septembre, alors qu'elle rentrait chez elle, Elisabeth a été interpellée par trois hommes d'une vingtaine d'années. Très rapidement, les insultes ont commencé à fuser. "Regardez cette pute en jupe !". Puis, suite à son "Pardon ?" : "Tu te tais salope et tu baisses les yeux". S'ensuivirent des coups. Attrapée par le bras, la jeune femme est frappée au visage. Puis le trio s'enfuit.
Des actes indignes. Et d'une lâcheté que fustige aujourd'hui la principale concernée. La lâcheté des trois agresseurs, oui, mais aussi celle de la quinzaine de témoins alentours qui, durant ce passage à tabac, n'ont pas réagi. "C'est ce qui me révolte le plus dans l'histoire", réagi aujourd'hui l'étudiante. Éloquentes, ses paroles ont émeut opinion publique et le paysage médiatique, qui (maladroitement) titre : "Agressée à cause de sa jupe".
Ou à cause des agresseurs, plutôt ? "La jupe n'est pas responsable de l'agression, et la femme encore moins", affirme l'ancienne secrétaire d'Etat chargée de l'égalité femmes-hommes et actuelle ministre déléguée à la Citoyenneté Marlène Schiappa. A France Bleu, elle poursuit : "Non, une femme est frappée parce qu'il y a des gens misogynes, sexistes, violents, qui s'affranchissent de toute loi et de toute règle de civilité en les frappant". Une réalité qui, de ses propres mots, "tord les tripes" de la politicienne.
Elisabeth a déposé une plainte au commissariat. Elle arbore aujourd'hui un oeil au beurre noir, et une colère encore intacte. Elle raconte : "Maintenant, il ne faut pas avoir peur de sortir, il ne faut pas avoir peur de mettre une jupe". Ce qu'elle a vécu la choque, mais, malheureusement, ne la surprend pas tant que cela.
En juillet et août, elle n'avait pas échappé à ces insultes systémiques, et à la perduration du harcèlement de rue en plein déconfinement. "C'est toujours des remarques dans le dos. Un mec va lancer 't'es bonne' et partir tout de suite. C'est toujours très lâche en fait. C'est ce que j'ai remarqué cet été : c'est l'été des lâches". Un intitulé-choc.
Et qui résume avec clarté ce que vivent les femmes, même en temps de pandémie mondiale. Durant le confinement, les harceleurs déjà étaient de sortie. Une victime, Judith, nous racontait alors : "Je me suis fait traiter de pute par un mec. Je lui demandais juste de pas se coller à moi dans la queue de la boulangerie. En ce moment, les mecs se défoulent, passent leurs nerfs sur les femmes". Les situations se suivent et se ressemblent.
"Des photos des affaires de femmes agressées, violentées, harcelées, j'en reçois tous les jours", approuve à ce titre Marlène Schiappa, qui salue le courage de celles qui, comme Elisabeth, subissent les remarques et violences les plus sexistes. "On n'a pas encore gagné le combat, mais les forces de l'ordre sont à pied d'oeuvre", assure la ministre à France Bleu, rappelant que 1 800 amendes ont déjà été dressées pour outrage sexiste en France depuis l'an dernier.
La route est encore longue au sein d'une société imprégnée par la culture du viol. Et ce n'est pas l'ode incertaine de Jean-Michel Blanquer au port d'une "tenue républicaine" qui fera changer les mentalités.