Axelle Njiké est l'autrice talentueuse à l'origine de Parlons Plaisir Féminin, un site dédié à la littérature sexuellement explicite au féminin, et de Païenne, texte érotique publié dans le recueil de nouvelles Volcaniques : une anthologie du plaisir (ed. Mémoire d'encrier). Elle est aussi la voix derrière Me My Sexe and I, le podcast brillant consacré à l'intimité de femmes noires, diffusé deux vendredis par mois.
Elle a pris le temps de répondre à notre questionnaire cul, d'évoquer l'atrocité de l'excision, qu'elle combat en étant administratrice au sein du GAMS (Groupe pour l'abolition des mutilations sexuelles), et d'expliquer pourquoi et comment reprendre les pleins pouvoirs de son propre sexe, se rendre compte de son importance, le chérir et lui faire du bien.
Axelle Njiké nous parle aussi des Quais de Seine, de son penchant pour ses doigts et nous rappelle à juste titre que "le féminisme, c'est aussi le droit de baiser avec qui l'on veut !".
Axelle Njiké : Mon intime est féministe. Et mon féminisme est intime. Et c'est à ce titre que j'ai choisi en tant qu'activiste, de me mobiliser pour l'abolition de la plus ancestrale des mutilations faites au féminin, l'excision. Cet outrage commis encore aujourd'hui dans le monde, à raison de 6 fillettes par minute, n'est ni une affaire de "blanche", ni une affaire de "noire", mais à mes yeux, une affaire de femmes. L'atteinte suprême nous étant faite à toutes, et l'expression même de la force féminine tue, écrasée et muselée.
Les mutilations sexuelles féminines dont l'excision est l'une des formes, sont infligées aux femmes en raison de leur sexe. Leur existence devrait interroger chacune d'entre nous, sur le rapport qu'elle entretient à son propre sexe.
Et c'est parce qu'elles s'inscrivent dans la chair même des femmes, sont une tentative de couper court à leur déploiement, une atteinte à leur rayonnement de la manière la plus intrusive possible, qu'il me semble primordial que le sexe évoque, avant même d'être synonyme d'un acte entre deux partenaires, la relation que l'on entretient chacune, individuellement, avec notre propre sexe.
Le sexe, ça commence avec soi. Dans la relation que nous entretenons avec cette partie, la plus intime de nous-même. La notion d'empowerment est indissociable à mes yeux, de cette relation. Nous devrions être les premières à aimer notre sexe, de façon propre et figuré.
Dans la majeure partie des cultures, le contrôle sur notre sexualité découle du fait que nous ne sommes pas envisagées comme des êtres à part entière, mais comme les propriétés de nos familles, de nos clans, de nos cultures. Nous demeurons des objets sexuels avant d'être des sujets.
Nous sommes méprisées et notre sexe, qui fait pourtant l'objet de toutes les convoitises, aussi. Pour cette raison, la (ré)appropriation par chacune de nous de ce dernier, devrait être un sujet majeur. Et figurer le premier bastion d'une émancipation incarnée.
Nous devrions être fières, individuellement et collectivement, de ce sexe dont nous sommes détentrices. Le clamer sur tous les toits et en revendiquer furieusement la possession.
Notre souveraineté n'est pas à aller chercher ailleurs, elle est en nous. Elle se niche là, à l'intersection de nos jambes, dans l'intime connaissance et revendication du droit à disposer, littéralement, de nous-même. Aimer NOTRE sexe, c'est être puissante, soutenir le féminin en nous et nous sentir soutenue par lui.
Et plus nous serons conscientes de cette vérité, et nombreuses à l'aimer farouchement, à l'aimer fort, à l'investir, cultiver le plaisir, la joie, la jouissance qu'il peut nous procurer au sens propre - et incarner au sens figuré cet état d'être, ne consentant pas à transiger pour moins que la joie d'être des femmes, plus nous transformerons authentiquement, profondément et durablement, la donne autour de nous.
Commençons par aimer notre sexe au sens propre et figuré – et ça implique au passage, d'apprendre à nos filles, dans une sorte de conspiration collective, à en faire de même, et plus nous pourrons prévenir, plutôt que guérir, l'aversion et les outrages dont il fait encore trop l'objet partout dans le monde.
Vos doigts ! Je suis en faveur d'un recours modéré au sextoy, car je trouve primordial d'entretenir une relation charnelle avec sa vulve, de ne pas privilégier l'objet à un rapport tactile direct. Combien parmi celles ayant recours aux sextoys, rechignent en vérité à se toucher ? N'aiment pas leur sexe ? Ne l'ont jamais regardé ? Senti ? Seraient incapables de le reconnaître dans un miroir ?
Moi je vous encourage à vous toucher, vous familiariser avec vos fluides et vos effluves. Qui plus est, les sensations procurées par vos propres caresses s'avéreront plus faciles à réitérer avec le partenaire de votre choix dans l'acte, contrairement à celles obtenues avec les vibrations électriques d'un sex toy !
Mon impudence de Parisienne, m'a emmenée en bonne compagnie, sur les quais de Seine, une nuit d'été.
"Montre-moi".
Lie with Me, un film canadien qui date de 2005, avec Eric Balfour et Lauren Lee Smith. Je ne l'ai pas revu depuis sa sortie bien que le DVD soit à la maison, mais j'ai souvenir de scènes très hot et d'une particulièrement, avec Leïla l'héroïne, dans un square... et puis surtout, il y a Eric Balfour dans ce film, et je crois que ça suffit comme argument.
Pouvoir me déployer dans toute la mesure de ma volupté.
Matthias Schoenaerts. Le patronyme du gars veut quand même dire "de belle nature", et franchement, qui dira le contraire ?
J'aime sa voix, ses mains, sa carrure, sa manière d'incarner son masculin, entre animalité et vulnérabilité. Je rêverais d'adapter au cinéma Le Boucher, d'Alina Reyes, avec lui dans le rôle-titre.
Oui, je suis sexuelle. Ni hétéro, ni bi, ni homo. Juste, sexuelle.
Certainement pas ! Cette vision selon laquelle cette pratique serait une forme de soumission, parle de celles et ceux qui la véhiculent. Pas de celles qui la kiffent, et dont je fais partie. Quant à l'idée que l'on ne pourrait pas être féministe, et aimer être prise en levrette, ça aussi c'est une connerie.
Jusqu'à nouvel ordre, le féminisme c'est AUSSI le droit de baiser avec qui l'on veut, dans la position de son choix ! Et soit dit au passage, la levrette est tout sauf une position de soumise ; c'est une position de voluptueuse qui s'assume et ne craint pas de prendre son pied.
C'est une pratique qui n'est synonyme de soumission que si l'on s'y retrouve contrainte et/ou si le partenaire avec lequel on s'y livre vous déconsidère par son attitude, ou dans ses mots. Le type qui pense que ça fait de vous une "salope", voire une "grosse salope" d'aimer ça, n'a rien à faire non seulement dans votre lit, mais également dans votre vie.
Pour le reste, faites ce qui vous fait du bien, et si c'est en levrette que vous aimez jouir, bah jouissez, et vive la levrette !
Mon entrée dans la sexualité s'étant faite par un viol lorsque j'avais tout juste 11 ans, je vais plutôt parler de mon premier rapport consenti survenu à 18 ans, qui a été fort heureusement, TRÈS chouette. Et son souvenir me fait encore sourire aujourd'hui.