On connaissait déjà les jeunes filles en feu, comme Adèle Haenel, actrice féministe, lesbienne, anticapitaliste, et il faudra désormais compter sur les... Lesbien·nes au coin du feu. C'est le nom d'un réjouissant podcast qui donne enfin de la voix à celles qui ont toujours contribué aux féminismes.
Et sans lesquelles ceux-ci ne seraient pas vraiment les mêmes. On ne cessera jamais de rappeler à quel point les femmes lesbiennes furent importantes dans l'Histoire des luttes, au sein du Mouvement de libération des femmes (MLF) par exemple. Autrices, artistes, essayistes... L'on pourrait citer tant de noms qui comptent : Monique Wittig, Audre Lorde, Valerie Solanas, bell hooks...
Plus intimiste qu'historique, les cinq épisodes constituant la première saison de ce podcast fédérateur - il a déjà fait l'objet de plus de 30 000 téléchargements - nous invite à écouter les personnes concernées, leurs affects, leurs émois, leurs sentiments qui foisonnent, autrement dit : leurs amours. Avec tendresse et quête de sens. Proposé par le média LGBTQ "Manifesto XXI", Lesbien·nes au coin du feu s'avère être un programme d'autant plus nécessaire en ce Mois des fiertés. Mais pourquoi donc ? On vous explique...
Un podcast dédié aux voix lesbiennes, c'est précieux dans une société qui tend si peu à leur conférer de la résonnance. Car qui pourrait-on citer, par exemple, comme journalistes lesbiennes officiant à la télévision ou à la radio ? Si vous galérez à trouver la réponse, c'est que vous la connaissez déjà.
Lesbien·nes au coin du feu déploie un espace sororal qui ne se limite pas à s'ouvrir aux personnes uniquement lesbiennes : il est également question des personnes bis ou pansexuelles. Des conditions qui ne sont pas forcément comprises dans la société d'aujourd'hui. Le maître mot de ces histoires persos ? L'amour. Qu'il fut éphémère ou durable. Idéal pour propager de bonnes ondes, loin de la dimension dramatique, fatalement tragique, qui demeure trop souvent indissociable des récits gays et lesbiens dans les films et les séries...
"Nous voulons diffuser des histoires lesbiennes pour donner le sourire, émouvoir et faire rêver", se réjouissent à l'inverse les instigatrices du podcast. Mais Lesbiennes au coin du feu, c'est aussi une autre manière, intime, politique, de penser la vie à deux, le couple, d'imaginer l'amour comme nouvelle révolution féministe. Dans la lignée d'un autre podcast qui compte, Le coeur sur la table de Victoire Tuaillon (décliné en livre aux éditions Binge).
En témoigne notamment, cette belle pensée issue du premier épisode :
"On lâche pas depuis le début de l'affaire d'essayer de construire une relation de couple qui soit aussi politique, en sachant qu'il y a des choses qu'on a pas envie de mettre en place, comme certains modèles hétérosexuels qu'on ne veut pas reproduire. On voulait aussi raconter notre rencontre parce qu'on considère qu'on est toujours en train de se rencontrer. On continue de se découvrir nous-même et l'autre un peu tout le temps..."
Le podcast dévoile également un compte Insta "pensé comme un lieu de refuge queer". Il y est question de photographie, de romans, de films. Ou encore, d'un slogan devenu viral de Twitch à Twitter, jusqu'aux pancartes des manifs : "Bravo les lesbiennes". Tout un élan générationnel s'y déploie.
A écouter ces épisodes on se rappelle surtout des lignes fédératrices d'Alice Coffin dans son si stimulant Génie Lesbien. A propos de ce titre qui en jette, l'autrice avait confié à Terrafemina : "Génie lesbien, c'est une revendication, une fierté, une expression performative qui veut dire : 'On ne baisse pas la tête'. Non seulement on ose se dire lesbienne, mais en plus on le revendique de manière extrêmement positive. Et joyeuse".
"C'est une manière de valoriser des role models galvanisants comme pour inciter à affirmer : je veux en être, je veux être de ce combat". Une lutte à laquelle nous invitent gaiement ces Lesbiennes au coin du feu.