7 livres LGBTQ+ vraiment réjouissants pour un Mois des fiertés révolutionnaire

Qui dit Pride Month - Mois des fiertés pour les amoureux de la langue de Molière - dit forcément : mobilisations qui fédèrent, échanges stimulants ponctués de drapeaux arc en ciel, slogans révolutionnaires... Mais aussi foultitudes d'icônes, de livres, de films emblématiques à rattraper au plus vite pour faire honneur au patri-matrimoine LGBTQ. Car les cultures LGBT s'écrivent aussi au fil de plumes et de voix subversives.

Lesquelles ?

Impossible de délivrer une sélection exhaustive évidemment, mais on peut déjà te recommander ces 7 livres-là pour bousculer les planches de ta bibliothèque. Entre manifeste et vulgarisation, visions queer radicales et pop culture, intime et politique, ces bouquins enthousiasmants en disent déjà long sur l'étendue d'un monde qui se pense par delà les codes et les limites de l'hétéronormativité.

Suivez le guide...

"Si vous ouvrez ce livre, c'est que vous voulez comprendre. Comprendre pourquoi Bilal Hassani est un homme mais qu'il aime porter des robes et des perruques, pourquoi votre fils refuse que vous offriez des jouets roses à votre petite fille, comprendre ce qu'est la non binarité"... Qu'elle décortique brillamment les masculinités à travers les bouclettes de Timothée Chalamet ou s'attarde sur le tabou de l'asexualité, l'autrice Aline Laurent Mayard dénote toujours par son style à la fois très incarné et positivement pédagogique.

Avec ce manuel, elle s'associe à Marie Zafimehy pour contrer les éditos réacs et blagues vaseuses : enfin un texte à la fois pop et sérieux sur le sens du pronom "iel", l'écriture inclusive, les stéréotypes de genre, la fluidité... Et tant d'autres expressions qui se voient définies et illustrées. A mettre entre toutes les mains.

A lire aussi : Libérés de la masculinité : comment Timothée Chalamet m'a fait croire à l'homme nouveau, de Aline Laurent-Mayard.

"Une lesbienne qui ne change pas le monde est une lesbienne en voie de disparition". L'élue et militante Alice Coffin a fait sienne cette citation de Nicole Brossard avec ce Génie lesbien qui a tant fait couler d'encre (l'espace de citations écourtées et mal reprises sur les plateaux télé) quitte à tout ce que relate ce manifeste soit éludé : la rareté des voix LGBT dans les médias tradis, le tabou du coming out, l'importance des représentations, la teneur profondément politique de la voix, et du corps lesbiens...

Ce que raconte surtout Alice Coffin, c'est la solidité de tout un matrimoine lesbien qu'il convient de faire rayonner aujourd'hui, des essais avant gardistes de Monique Wittig (La pensée straight) aux nouvelles formes d'expression foisonnantes, comme la newsletter Lesbien Raisonnable. Des paroles plurielles. Révolutionnaires ? Oui. Alice Coffin nous expliquait pourquoi : "Les lesbiennes n'ont pas à composer en permanence avec les hommes. En soi, elles incarnent une forme de résistance". A bon entendeur.

A lire aussi : Comment devenir lesbienne en dix étapes de Louise Morel, Le corps lesbien de Monique Wittig, La pensée straight de Monique Wittig.

C'est quoi, être "queer" ? Pour simplifier, on pourrait dire comme le dico Larousse qu'est queer toute personne "dont l'orientation ou l'identité sexuelle ne correspond pas au modèle social hétéronormé, et qui affirme son refus des catégories liées au sexe"... Cest à dire, qui s'émancipe volontiers de la "binarité" : la désignation de deux genres, le masculin et le féminin, et tous les stéréotypes bien ancrés qui vont avec. Et voilà.

Mais en vérité, le queer, c'est un mot qui n'a cessé d'évoluer avec les années, ne date pas d'hier, et dont les définitions abondent. C'est aussi une vision du monde, une culture, un terme très galvaudé, qui renvoient à tout un éventail de mots très actuels - gender fluid, non binarité... Et tout cela, ce guide illustré pour les plus jeunes (à partir de 14 ans) édité par Gallimard Jeunesse, l'explique très bien. On salue le didactisme de Rowan Lewis et Jacky Sheridan, et leur propension à nous ouvrir les yeux par-delà les étiquettes.

A lire aussi : Trouble dans le genre de Judith Butler, Épistémologie du placard d'Eve Kosofsky Sedgwick.

Ca veut dire quoi, vivre dans un monde où l'hétérosexualité est la norme ? Et si l'hétérosexualité, plus qu'une orientation sexuelle, était un système à part entière ? Ou plutôt un "cistème" - celui des cisgenres, c'est à dire les personnes dont l'identité de genre correspond à celle qu'on leur assigne à la naissance ? Dans un monde où être hétéro correspond à la neutralité, que représente au juste le fait de se mettre à la marge ?

Ces questions brûlent les lèvres dans une société où l'on parle de plus en plus "d'hétéronormativité", et l'on peut compter sur l'auteur·e, chercheur·e trans et activiste Juliet Drouar pour nous proposer des pistes de réflexion dans ce manifeste aussi subversif que militant paru chez Binge Audio Editions. Une lecture profondément politique qui éveillera forcément votre intérêt si vous avez épuisé le podcast Les couilles sur la table.

A lire aussi : Les hommes hétéros le sont-ils vraiment ?, de Leane Alestra, En finir avec Eddy Bellegueule d'Edouard Louis, Désirer à tout prix de Tal Madesta, Neutriser : émancipation(s) par le neutre, par Lila Braunschweig, Les couilles sur la table de Victoire Tuaillon...

Ecrivains, artistes, activistes, sportifs, journalistes... Aucun profil ne manque à l'appel dans ce bouquet hyper coloré et inspirant de personnalités LGBTQ plus ou moins connues, concocté par Florent Manelli. Une ode furieusement polyphonique à celles et ceux qui n'ont cessé de se battre pour leurs droits, que leur lutte se fasse dans la rue, dans un livre, sur une toile, de Paris à Istanbul en passant par les Etats-Unis et le Bangladesh.

C'est donc un livre que l'on traverse comme on le ferait d'un Musée, aux galeries ponctuées de toiles célébrant, plus que la culture homosexuelle, une société où s'entrecroisent les mobilisations : les âmes créatives mises en avant sont queer mais aussi musulmanes, afroféministes, transgenres... A l'intersection de toutes les oppressions, elles font résonner une parole que ce manuel recueille et relaie avec fierté. Un sentiment positivement contagieux.

A lire aussi : 40 LGBT qui ont changé le monde, tome 2 de Florent Manelli.

Dans la lignée de livres comme Queer et fières, Queer Theory relaie des infos que se gardent bien de nous apprendre les manuels d'histoire.

On y apprend l'origine du mot queer et le terme de "kinknormativité" (hashtag #BDSM), on y retrouve, synthétisés, les travaux fondamentaux de Judith Butler sur le "trouble dans le genre" tout comme les réflexions de Simone de Beauvoir sur la condition féminine.

En fait, Queer Theory est un exemplaire travail de vulgarisation assuré par l'autrice Meg-John Barker, qui prend à bras le corps d'une manière universitaire - mais jamais ronflante - les travaux de celles et ceux qui n'ont jamais cessé de penser le genre, la sexualité, et LES sexualités. Quitte à tout déconstruire.

A lire aussi : Testo Junkie de Paul B Preciado, Théorie queer et cultures populaires, de Teresa de Lauretis.

Oui bon, ce titre un brin rentre dedans n'est peut être pas la proposition la plus agréable de votre semaine. Et pourtant, c'est celui d'un texte majeur. Après une réédition du fondamental Scum Manifesto préfacée par Lauren Bastide, les éditions 1001 nuits continuent leur travail de réhabilitation d'une voix sulfureuse : l'autrice lesbienne, misandre, travailleuse du sexe, ravageuse, subversive (aucune mention inutile) Valerie Solanas. Bien des lecteurs la connaissent comme "la femme qui a tiré sur Andy Warhol" mais ignorent tout de son écriture. C'est dommage.

Car avec Dans ton cul, pièce de théâtre qui se réceptionne comme une claque sur la joue, on s'initie à l'ironie dévastatrice d'une portraitiste sans pareille quand il s'agit de ridiculiser les hommes hétéros - et les femmes qui épousent leurs pas. On rit, s'offusque, on repère des lignes qui, des décennies plus tard, se retrouveront dans les manifestations féministes : "Je te protégerai". "Me protéger de quoi ? des autres hommes ?".

Par le biais d'une traduction très moderne assurée par la romancière Wendy Delorme, on pense surtout fort, mais vraiment très fort, au style tout aussi virulent d'une autre autrice d'exception, admiratrice revendiquée de Solanas : Virginie Despentes. Lisez plutôt : "On vit vraiment dans un monde de merde. Ma seule consolation c'est d'être moi - vive, dynamique, célibataire et gouine".

Amen ?

A lire aussi : Scum Manifesto de Valerie Solanas, King Kong Théorie de Virginie Despentes, Apocalypse Bébé de Virginie Despentes, Moi les hommes, je les déteste de Pauline Harmange...