Drôle de tribu composée de cinq moustachus et de la détonante Liliboy, les inclassables Deluxe creusent leur sillon groovy dans le paysage musical français depuis près de 10 ans. Après avoir fait frétiller leurs fans lors de concerts sauvages à travers la France, revoici les Aixois farfelus avec un troisième album, Boys & Girl, aux basses funky, voix sautillante et refrains solaires. Un disque anti-sinistrose taillé sur mesure pour rythmer nos longues soirées d'été et bouger des pieds, un verre de Spritz à la main. Rencontre avec la chanteuse Liliboy, échappée le temps d'une interview de sa bande de joyeux drilles à poils.
Liliboy : C'est un nom que le batteur Kilo m'a donné très intuitivement après mon intégration au groupe en 2010. Je suis rentrée dans un groupe de cinq garçons, cinq potes très "boys band" et je pense que c'était facile de m'intégrer en tant que "petit frère". C'est donc resté.
L : C'est le titre le plus simple qu'on ait trouvé, qui nous définit par nos genres. Pourtant, plus je grandis avec ces garçons, plus je me rends compte qu'on partage les mêmes sensibilités. L'album parle beaucoup de nos histoires, de nos ruptures, des conversations qu'on a pu avoir pendant ces dernières années au sujet de notre cohésion de groupe. Nous sommes tellement plus que des garçons et une fille !
L : C'était leur groupe à la base dans lequel je me suis incrustée, mais maintenant, je suis la chanteuse lead et j'ai donc un rôle qui inverse cette tendance. J'arbore moi-même fièrement la moustache à ma manière, avec des boucles d'oreilles par exemple. C'est notre signe de ralliement ! Pourquoi ? Parce que l'un de nous est gravement malade avec la maladie de la moustache : il se la rase et elle repousse le lendemain trois fois plus drue et plus épaisse (rires). C'est par solidarité qu'on l'a tous adoptée.
L : J'ai l'impression d'être protégée. Je me permets d'ailleurs peut-être plein de choses parce que je suis en permanence avec ces cinq mecs. Et puis je fais ce que je veux en tant que fille et je ne suis pas limitée par mon genre. Je me permets tout ce que mes collègues se permettent !
L : Oui, clairement. Chanter, c'est se faire vibrer, c'est se sentir vivant. C'est très direct, très sensoriel. J'ai trouvé ma place, l'une de mes fonctions sur cette terre !
L : J'ai l'impression que je n'ai jamais vraiment été victime, mais j'entends quand même : "C'est un truc de bonne femme", "De toute façon, les bonnes femmes"... Ça ne me touche même pas, ça m'apparaît comme une blague, mais ça ne l'est pas pour tout le monde et du coup, je ne me sens pas toujours très légitime.
J'ai l'impression parfois d'être "privilégiée" en tant que seule fille du groupe, c'est à moi qu'on propose une loge supplémentaire, c'est à moi qu'on apporte des fleurs, c'est à moi qu'on veut faire la bise. Personne ne veut juste me serrer la main... Je veux juste serrer la main, moi ! Du coup, je suis limite victime de discrimination positive ! Nous sommes partis en tournée acoustique pour faire la promo de notre album et rencontrer notre public et le seul incident qui nous est arrivé, c'est les garçons qui se sont fait pincer les fesses un par un et attraper le paquet !
L : Si le féminisme est l'égalité hommes-femmes, clairement !
L : Bianca et Sierra, les chanteuses du groupe CocoRosie. Elles m'ont bercé les oreilles quand j'étais jeune. Et Lauryn Hill, qui est elle aussi une femme dans un groupe de mecs, les Fugees et qui a su tellement montrer sa force, son talent et son énergie.
L : L'égalité salariale en France.
L : Sally Lockhart dans le livre de Philip Pullman.
L : "Doing it kind of wrong is better than not at all" ("Le faire un peu mal vaut mieux que pas du tout").
L : J'ai récemment fait l'ascension du Mont Ventoux avec Beyoncé qui criait "Who run the world ? Girls !".
L : Les deux filles de la série Broad City, Ilana et Abbi.
L : Les banaliser. Qu'on ne se dise pas : "Tiens, une femme !". Il faudrait que cela soit juste... normal.
Deluxe, album Boys & Girl, disponible depuis le 7 juin 2019.