Un bébé sous Prozac ? Cette abomination semble pourtant bien réelle, en témoigne un récent article du New York Times intitulé Still in a Crib, Yet Being Given Antipsychotics ("Encore à la crèche et déjà sous antidépresseurs") dans lequel le journal rend compte des derniers chiffres délivrés par l'IMS Health. Ce groupe de consulting médical a en effet livré des données plus qu'inquiétantes sur un phénomène pourtant bien réel. Ainsi en 2014, près de 20 000 prescriptions d'antipsychotiques tels que le Rispéridone (Risperdal) ou le Seroquel auraient été établies pour des enfants âgés de moins de deux ans, faisant ainsi bondir de 50% lesdites prescriptions. Quant au célèbre Prozac, l'IMS Health relate que 83 000 prescriptions auraient également été rédigées à l'attention des tout-petits, "tempérant" toutefois ce chiffre en précisant que sur les 83 000, beaucoup étaient certainement destinées aux mêmes patients, estimant toutefois à 10 000 le nombre de bébés mis sous Prozac en 2014.
Interrogés par le New York Times, la dizaine de pédopsychiatres se sont déclarés étonnés par de tels chiffres, d'autant que ces médicaments ne sont habituellement prescrits qu'aux sujets âgés de 5, voire 8 ans minimum, et qu'aucun recul ni étude ne permet de prévoir les conséquences d'un tel traitement sur le développement de l'enfant. S'il pourrait dans certains cas s'agir de prescriptions destinées aux parents, et passés sur l'assurance santé de l'enfant, il semble pourtant bien que, désarmés devant les comportements violents, hyperactifs ou encore apathiques de certains bébés, les médecins consultés cèdent devant le désarroi des familles, administrant ces produits pourtant dangereux.
Car le problème semble bien découler de l'ignorance des spécialistes consultés, les pédopsychiatres étant bien trop peu nombreux aux Etats-Unis (8350 en tout pour 320 millions d'habitants). Soumis à de longues listes d'attente, mais aussi aux prix parfois très élevés de telles consultations, les familles déroutées par le comportement de leur bébé se résigneraient ainsi souvent à consulter le pédiatre familial, voire un médecin généraliste non formé à ce type de pathologies. Pourtant, il existe bien des façons de traiter les troubles du comportement chez l'enfant et, même chez les sujets plus âgés, les pédopsychiatres conseillent vivement de toujours accompagner la prescription d'antidépresseurs d'un suivi psychologique.