Elle nous reçoit dans son bureau élégant du quai des Orfèvres, sereine et décontractée, une attitude qui contraste avec son métier trépidant de procureur adjoint. Elle, qui est constamment appelée, demande à ne pas être dérangée pendant cet entretien.
Modeste et discrète, Dominique Planquelle n’est pas habituée à parler d’elle. Pourtant son parcours pourrait faire rêver plus d’un étudiant en droit et inspirer quelques unes de nos séries policières. Après des études de droit, elle passe le concours de la magistrature qu’elle remporte brillamment : « Je ne me voyais pas en avocate, pour moi le métier de magistrat était une évidence car il représentait un idéal porteur ».
Ainsi, elle rejoint le prestigieux cercle de la magistrature : « quand je suis arrivée au Parquet en 1985, j’ai travaillé sur de très belles affaires, Boutboul, le prédateur Paulin (surnommé le tueur des vieilles dames) ». Des enquêtes passionnantes, qui lui ont permis d’apprendre le métier et de se forger l’esprit.
" Il faut essayer de garder son sang froid, de prendre la bonne décision rapidement "
Aujourd’hui, elle exerce la fonction de procureur adjoint au TGI de Paris. Son domaine d’intervention est le droit pénal général : « on est dans la gestion des affaires ordinaires, celles dont on n’entend pas forcément parler mais qui se produisent quotidiennement, et celles qui ont un caractère sensible, explique-t-elle. Notre rôle est d’essayer de trouver des solutions pour défendre l’intérêt des victimes et préserver l’ordre public ». 40 magistrats sont directement sous son autorité, elle anime et coordonne leurs actions en temps réel.
A quoi ressemble sa journée type ? « Le téléphone sonne tous le temps, je dois régler des problèmes dans l’urgence, je suis constamment sollicitée par les magistrats qui me rendent compte des affaires qui présentent une particularité ou une difficulté. Il faut essayer de garder son sang froid, de prendre la bonne décision rapidement ». Inutile de dire que le lundi matin (retour du weekend), lors de grandes manifestations, les affaires sont encore plus nombreuses et la pression d’autant plus renforcée.
Toutes les cinq semaines, Dominique Planquelle est de permanence pendant huit jours. Autrement dit, en cas d’infraction grave, elle est susceptible d’être appelée de jour comme de nuit et doit parfois partir immédiatement sur le terrain. « Il m’est arrivé d’être appelée 30 fois en un week end ; dans mon métier on ne peut rien prévoir », s’exclame-t-elle en souriant.
Pas facile donc de décrocher une fois la journée terminée.
"Mon métier est très absorbant"
Dominique Planquelle ne cache pas que sa fonction n’est pas vraiment compatible avec une vie de famille et que le soir elle a bien du mal à se détendre : « mon métier est très absorbant, il est très difficile d’avoir une vie en dehors, dit elle. Quand je sors d’ici après une journée entière de travail, je n’ai aucune envie d’aller au restaurant ou au cinéma ». Mais si en semaine il est difficile pour elle de prévoir un emploi du temps en soirée, les week-ends hors permanence sont des jours qui lui appartiennent.
Et à la question comment fait-on pour croire encore en l’humain après avoir vu des choses aussi insoutenables ? Elle répond : « on est obligé de prendre de la distance, mais il y a des affaires dont on ne ressort pas indemne et qui vous poursuivent toute votre vie ». Dominique Planquelle sait comment ne pas se laisser gagner par l’émotion dans son travail, mais dans sa vie privée elle confie s’être souvent inquiétée anormalement quand sa fille sortait tard le week end.
Ce qui la fait tenir ? A l’évidence la passion. Faire avancer la société, voir le droit évoluer : « c’est un beau challenge de participer à l'oeuvre de justice non ? Mais c’est un métier où il faut surtout garder beaucoup d’humilité », ajoute –elle.
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