Mimi et Joe Lemay sont aujourd'hui soulagés, comme Jacob, leur petit garçon, qui a accepté que sa maman témoigne de son expérience d'enfant trans. Récit.
Depuis sa naissance, Mia est différente. De ses deux soeurs, jolies fillettes bien dans leurs robes à smocks, mais aussi des autres enfants. Elle ne s'aime pas, est renfermée et se change jusqu'à douze fois par jour tant aucune tenue ne semble trouver grâce à ses yeux. À trois ans, elle le décrète avec aplomb : elle est un garçon. Ses parents comprennent alors "garçon manqué". En effet, Mia préfère jouer aux jeux considérés comme masculins et semble forcer le trait dans sa manière de parler. À la maison, ce combat incessant prend de plus en plus de place, et Mia paraît ne plus focaliser son attention que sur ce but ultime : être enfin considérée comme un garçon à part entière.
Lorsqu'elle fête son cinquième anniversaire, ses parents décident alors d'accéder aux désirs de leur enfant, en le traitant comme un garçon à la maison. Ils acceptent également qu'il se coupe les cheveux et troque sa garde-robe pour les vêtements de son choix. Lorsqu'ils parlent de Mia, ils disent maintenant Jacob et en parlent au masculin. Les choses se passent alors mieux, même si ses soeurs le taquinent un peu et que le problème de l'école reste prégnant. De plus, Joe et Mimi s'inquiètent de ce que, au-delà de vouloir adopter un look masculin, Jacob/Mia déteste son corps. "Pourquoi Dieu m'a-t-il fait de cette façon ? Pourquoi Dieu me fait-il tant de mal ?", l'entendent-ils souvent se désoler, impuissants devant la souffrance de leur enfant.
En avril 2014, alors que la famille s'amuse à Disney World, Jacob a opté pour un déguisement de prince, dans lequel il passe sa journée en public. Des inconnus félicitent ce petit garçon "si beau". Joe et Mimi se souviennent alors des étoiles dans les yeux de leur fils, qui irradiait. Ils comprennent ce jour-là que pour qu'il soit heureux, il doit aller au bout du processus. Pour s'en assurer, ils lui font visionner un reportage sur Ryland Whittington, un autre petit garçon trans. Les larmes aux yeux, sa maman lui dit alors : "Tout ce que nous voulons, c'est que tu sois heureux. Mais nous avons besoin d'aide pour comprendre ce qui te rendra heureux." Son père lui demande s'il veut être comme Ryland, et que tout le monde sache qu'il est un garçon. "Je ne peux pas, je dois être Mia à l'école", leur répond-il alors, avant que Joe et Mimi ne lui proposent d'intégrer une nouvelle école à la rentrée, dans laquelle il pourrait réellement devenir Jacob.
Depuis, sa mère déclare que Jacob, s'il n'a pas radicalement changé de comportement, est heureux, complètement sorti de sa coquille, est immédiatement devenu plus sociable, plus affectueux et ouvert aux les loisirs. "Il devient lui-même", résume simplement son père. Les Lemay espèrent qu'à travers leur expérience, de nombreuses familles sauront mettre des mots sur le mal-être de leur enfant, et accepter de l'aider à devenir lui-même.
Dans un article paru sur Slate, on apprend qu'il y aurait environ un enfant transsexuel sur 500 soit, en France, environ 132 000 personnes touchées par cette réalité très souvent incomprise par les parents, les enseignants et le corps médical lui-même, peu formé au soutien de ces enfants désireux de trouver leur identité. En décembre 2014, un rapport remis au Conseil de l'Europe a permis de lever le voile sur ces "invisibles" en souffrance.