Sophie Schmitt : Ce n’est guère étonnant quand on sait que la moyenne d’âge des sondées est de 64 ans. Plus de la moitié des jeunes seniors (65% selon une étude Credoc) de 60 à 70 ans sont sur Internet et adoptent les mêmes comportements que les internautes français. En revanche, je pense que si l’on observe les plus de 70 ans on remarque une vraie fracture : seuls 25% des 70-80 ans sont équipés d’une connexion Internet. Il faut noter aussi que chez les seniors, le taux d’équipement varie beaucoup en fonction de la catégorie socioprofessionnelle ; les CSP + seniors sont équipés à 80% par exemple. Votre étude montre néanmoins que les femmes seniors achètent un peu moins de vêtements et d’accessoires de mode que les autres (57% pour les retraitées, 73% pour la moyenne des femmes). Cela s’explique par le fait que dans la vie courante elles ont moins d’occasions de représentation et ne doivent pas s’habiller pour aller travailler. On sait que les femmes à la retraite dépensent globalement moins dans les boutiques de vêtement que les actives, et cela se vérifie aussi dans le e-commerce.
S. S. : On peut nuancer puisqu’on constate que le prix est un peu moins important pour les retraitées que pour la moyenne des femmes : 72% des retraitées le placent comme premier critère, contre 82% des femmes en général. Cet écart de dix points est intéressant. Gardons à l’esprit que le pouvoir d’achat des jeunes retraitées est supérieur d’au moins 15% par rapport à celui de la population active, de fait elles sont plus intéressées par le rapport qualité/prix et n’abdiquent pas sur la qualité au prix d’une bonne affaire.
S. S. : Le taux de pénétration de la tablette est moindre chez les 60-69 ans : 3% contre 4% pour l’ensemble de la population. Parce que les seniors restent davantage chez eux, le besoin de commander en ligne depuis un support mobile est moins élevé. En outre, la taille des écrans peut les retenir de passer à la tablette. Le tactile en revanche représente plutôt une opportunité : le format et le rapport direct à l’écran les intéressent, et on peut supposer que la tablette ne va pas tarder à conquérir ces « silver-surfers ».
S. S. : Les seniors préfèrent le multi-canal, c’est-à-dire qu’ils achètent plutôt sur des sites de marques familières ou qui existent dans le commerce physique que sur des pure-players du e-commerce. Quand on les interroge sur leurs habitudes, ils n’ont pas l’impression de pratiquer l’e-commerce alors qu’ils achètent des billets sur les sites Voyages-sncf.com et AirFrance.fr. Les marques qu’ils connaissent et à qui ils font confiance restent leurs points de repères sur Internet.
S. S. : Le fait d’acheter sur un coup de tête en se disant qu’on peut éventuellement revendre est une habitude de consommation récente et propre aux jeunes générations. Les seniors penchent pour un achat plus solide et plus durable. J’ajouterais que dans la vie des femmes, il y a une période où de gros volumes de revente sont envisageables : vêtements d’enfants, jouets, livres, etc. À la retraite, elles ont largement eu le temps de faire le tri et de se débarrasser, et ce qui reste est souvent donné aux enfants. Enfin, les étapes pour mettre en vente un objet sont plus complexes et peuvent rebuter certains.
S. S. : Les seniors de demain sont les actifs d’aujourd’hui, donc une population encore plus connectée, qui a vécu à fond les années Internet, même pour les plus de 70 ans. On peut s’attendre à des volumes d’achat considérables dans le e-commerce. Les sites devront être adaptés ; il y a la taille des caractères mais aussi l’ergonomie et la navigation. Généralement, les seniors n’aiment pas beaucoup les pages surchargées et les animations envahissantes. Je pense que pour les produits standards que ces clients ont l’habitude d’acheter, l’e-commerce doit faire la différence en étant compétitif sur les prix. Pour les produits plus techniques, comme les produits liés à la dépendance, on peut penser que ce sera peut-être plus compliqué de convaincre les acheteurs en ligne, car ils préféreront voir ce qu’ils achètent.
*D’après une étude menée par l’institut CSA dans le cadre de l’Observatoire eBay-Terrafemina sur les nouveaux usages du e-commerce. Enquête réalisée par Internet du 25 octobre au 5 novembre 2012, sur un panel de 500 femmes retraitées ayant effectué au moins un achat en ligne au cours des 6 derniers mois (âge moyen 64 ans), et 575 femmes de 18 ans et plus ayant effectué au moins un achat en ligne au cours de 6 derniers mois (âge moyen 42 ans).
Les résultats complets de l’Observatoire eBay-Terrafemina sur les femmes séniors et le e-commerce
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