Les violences se perpétuent, ce n'est pas nouveau. On sait depuis longtemps que les enfants victimes de violences physiques ou sexuelles ont tendance à les reproduire une fois adultes. Aujourd'hui, le cas d'une personne tristement célèbre à travers le monde l'illustre : l'abbé Pierre.
Décédé en 2007, l'abbé Pierre est depuis juillet 2024 visé par une série de témoignages de femmes l'accusant de violences sexuelles commises entre les années 1950 et les années 2000. Baisers imposés, fellations forcées, propos à caractère sexuel... Ces révélations ont fait l'effet d'une onde de choc durant l'été. Et pourtant, comme souvent, on a découvert que durant toutes ces années, tout le monde savait. On vous racontait dans cet article comment son propre fils avait déclaré qu'il n'avait "pas été choqué" d'apprendre les agissements de son père.
Toutefois, il restait à découvrir comment l'abbé Pierre était devenu un tel prédateur sexuel. Le journal Le Monde a apporté de nombreux éléments de réponse dans un article publié le 13 décembre. Dans les archives de l'ordre des capucins, le journal a eu accès à la correspondance de Henri Grouès, futur abbé Pierre. Interviewée par Mohamed Bouhafsi pour l'émission C à Vous, Marie-Béatrice Baudet, la journaliste qui a eu accès à cette correspondance, raconte l'une des lettres que l'abbé a adressée à son maître des novices, Louis-Antoine de Clermont-Ferrand.
"La première confidence qu'il lui fait concerne cette mutilation possible de son sexe, raconte-t-elle. Il va chercher ce couteau de table et il va tenter de se débarrasser de cette chose qu'il déteste et qu'il va détester par la suite, comme il le dit plus tard." Une mutilation qui serait survenue alors que le futur abbé n'avait que 5 ans. Et ce n'est pas tout.
"Il parle de cette agression sexuelle qu'il a eu peut-être à 7 ans ou 9 ans par des grands, quand il était pensionnaire au collège des Minimes à Lyon, qui en ont fait sa proie, poursuit la journaliste du Monde. Donc il se fait souffrir, son corps le répugne et ses pulsions le répugnent." Comme le résume Marie-Béatrice Baudet, la correspondance de l'abbé Pierre révèle "un homme brisé, nerveux, torturé".
D'autres lettres révèlent également la folle passion qu'il aurait eu à l'égard d'un jeune homme prénommé Yves, lorsqu'il avait 14 ans, après l'avoir entendu chanter lors d'une messe de minuit.
Cet éclairage sur la jeunesse de l'abbé Pierre n'a pas vocation à excuser les violences sexuelles qu'il a ensuite perpétrées sur d'autres personnes. Toutefois, il donne un argument de plus en faveur de la nécessité urgente de soigner notre société malade où les valeurs patriarcales permettent largement aux violences sexistes et sexuelles de se perpétrer.