Le tribunal de Paris a tranché : il ne sera pas question de donner raison aux associations e-Enfance et La Voix de l'enfant. Pornhub, Xhamster, Xvidéos, YouPorn, RedTube, Tukif, Xnxx, MrSexe, IciPorno ne seront finalement pas bloqués sur le territoire français, bien que les filtres censés limiter leur accès aux moins de 18 ans soient reconnus insuffisants par la loi, et ce, depuis juillet 2020. Ou plutôt, les fournisseurs d'accès à Internet (FAI) ne seront pas réglementés. "Il est question d'agir sur les tuyaux pour fermer les robinets", image maître Laurent Bayon, l'avocat de deux associations, auprès de Télérama.
Pourtant, rappelle le magazine, il est interdit de fabriquer ou diffuser "un message à caractère pornographique" lorsque celui-ci est "susceptible d'être vu par un mineur". La décision a donc de quoi étonner (et agacer) celles et ceux qui se battent pour la protection de l'enfance.
"Ces sites sont hors la loi", martèle Justine Atlan, présidente d'e-Enfance. "S'ils ne trouvent pas de solution pour se conformer à notre législation, qu'ils changent de métier. Contrairement à ce qu'ils suggèrent souvent, nous ne sommes pas engagés dans une croisade contre la pornographie. Ce que font les adultes dans le cadre de la loi ne nous regarde pas." Ce à quoi sont confrontés les enfants en revanche, c'est justement leur combat.
Les chiffres révélés par un sondage Opinion Way pour 20 minutes révèlent l'ampleur du phénomène. Parmi les répondant·e·e âgé·e·s de 18 à 30 ans, un sur trois avait déjà été exposé à du porno à l'âge de 12 ans (les cas involontaires sont "heureusement relativement rares", analyse toutefois la responsable), et 62 % des jeunes ont vu leur première vidéo avant 15 ans.
"Nous disposons désormais d'un certain recul, qui permet de mieux mesurer les effets sur les jeunes de cette exposition", alarme-t-elle. "Les 18/25 ans qui ont été au contact de ces contenus il y a dix ans reconnaissent aujourd'hui qu'ils auraient préféré les voir plus tard".
Alors, à quand des mesures concrètes ? Depuis le 8 octobre au matin, en tout cas, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) peut désormais adresser une mise en demeure à un site X qui permettrait aux plus jeunes de consulter trop aisément ses contenus. "Une fois mis en demeure, ces derniers disposent de 14 jours pour répondre au problème. Si ce délai n'est pas respecté, le décret précise que leur accès sera bloqué", précise Libé. Reste à ce que la procédure débouche sur une action radicale par la suite.