Ozgecan Aslan est devenue le symbole de la rébellion en Turquie. Cette jeune étudiante de 20 ans a été retrouvée morte vendredi 13 février, dans une rivière de sa ville natale de Tarsus, dans le Sud du pays. La presse locale rapporte qu’elle a été tuée par le chauffeur du minibus la ramenant chez elle qui avait tenté de la violer. Avec l’aide de deux complices, il lui a coupé les mains avant de brûler entièrement son corps pour que la police ne puisse retrouver ses empreintes digitales ou identifier son ADN. En dépit de ces précautions, les trois hommes ont été interpellés et écroués dimanche 15 février.
L’assassinat d’Ozgecan Aslan a créé une onde de choc en Turquie. Défiant l’imam qui leur avait demandé de rester à l’écart, des centaines de femmes ont assisté à ses funérailles et ont porté le cercueil de la jeune fille dans les rues pour signifier leur colère.
Dans les jours qui ont suivi, des milliers de personnes, femmes et hommes confondus, ont manifesté leur indignation dans plusieurs grandes villes du pays. « Nous ne sommes pas en deuil, nous sommes révoltés » pouvait-on lire sur les affiches brandies par les manifestants. Des appels ont retenti sur les réseaux sociaux pour que les victimes de viols et de harcèlement brisent la loi du silence et témoignent au sujet des agressions subies et de leurs moyens de défense en utilisant le mot-dièse #sendeanlat (« #toiaussiraconte »).
A quatre mois des législatives, les manifestations ont également pris un tour politique. Accusé par l’opposition de fermer les yeux sur les violences faites aux femmes, le président Recep Tayyip Erdogan, a dénoncé ceux qui, « prennent plaisir à la mort de quelqu'un » et espéré que les assassins présumés de la jeune femme recevraient « la peine la plus sévère ».
Le conservatisme du gouvernement turc en matière de droits de femmes n’est cependant plus à démontrer. Les propos du ministre de la Santé turc, qui affirmait, le 2 janvier dernier, que « les mères ne doivent pas mettre d'autres carrières que la maternité au centre de leur vie », ont fait scandale. Ces déclarations font d’ailleurs écho aux multiples saillies misogynes du chef de l’exécutif. Ce dernier avait estimé, en novembre dernier, que l'égalité hommes-femmes était un combat « contre nature » et comparé la contraception à « une trahison ».
Au cours des dix dernières années, les assassinats de femmes par des hommes ont triplé dans le pays, selon les ONG. Et entre 2003 et 2013, les violences domestiques ont augmenté de 1400%.
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