Le 8 octobre dernier, le youtubeur Squeezie a battu un nouveau record : réunir, sur la plateforme Twitch, un million de spectateurs en direct à l'occasion du GP Explorer, une course de F1 mettant en concurrence plusieurs créateurs et créatrices de contenu. Quelques semaines plus tôt, en septembre, le Z Event, un évènement caritatif organisé chaque année sur la plateforme par le streameur ZeratoR, était parvenu à réunir plus de 10 000 millions d'euros au profit de plusieurs associations.
C'est un fait : via Twitch, les streameurs et streameuses possèdent une réelle force de mobilisation. Mais cette exposition est aussi l'occasion pour un bon nombre de trolls mal intentionnés, minorité visible et ultra-bruyante sur Internet, de s'exprimer. Et les femmes sont évidemment en première ligne. Derrière les sourires et les bons moments partagés se cache une toute autre réalité, bien sombre.
Cette réalité, la streameuse Maghla a décidé de la dénoncer dans un long thread publié sur Twitter, ce lundi 24 octobre. Suivie par quasiment 700 000 personnes sur Twitch, la jeune femme fait l'objet d'insultes d'une rare violence, de messages à caractère sexuel et d'objectification.
"Je suis fatiguée et il est temps que je vous explique. Des années que je streame et j'ouvre ma g*eule sur 10% max du problème, parce qu'apparemment, faut ignorer pour que ça passe", débute la jeune vidéaste.
Mahgla reçoit énormément de commentaires sur sa tenue, quoi qu'elle porte. Sa sexualisation et le harcèlement dont elle est victime vont bien au-delà de Twitch (où les tchats en ligne sont modérés en direct, et certains internautes bannis), puisqu'ils ont lieu aussi sur les plateformes Reddit, Discord ou bien encore sur les forums.
Mahgla dénonce ainsi un véritable trafic de son image, dénaturée et exploitée pour satisfaire des envies sexuelles. "Il y a des centaines de pages de gens qui se br*nlent sur mes photos et les postent. Littéralement. Également des montages encore et encore et les commentaires peuvent aller du 'je la viole' à 'je vais la pénétrer cette chienne' etc.. Le forum est alimenté tous les jours", écrit-elle encore.
Et en plus des mentions et des commentaires à son égard, la streameuse se heurte à des approches encore plus intrusives, puisqu'elle est assaillie de messages privés, notamment de dick pics et de menaces de viol.
Maghla explique ensuite ne pas être la seule à vivre cet enfer. A cela s'ajoutent des remarques qui mettent en doute sa légitimité sur la plateforme : les streameuses auraient du succès parce que ce sont des femmes et/ou parce qu'elles sont jolies.
La prise de parole de Mahgla est à saluer. Les streameuses, moins représentées sur Twitch, ont rarement l'occasion de s'exprimer à ce sujet ou choisissent souvent de ne pas le faire pour ne pas jeter de l'huile sur le feu. Dénoncer ces violences, quand on est aussi connue, c'est en effet s'exposer à un féroce retour de bâton et à des raids en masse. Ultia, une autre streameuse, avait ainsi subi une vague de harcèlement après avoir dénoncé le sexisme ordinaire au Z Event en 2021.
"Ultia vit des choses que nous, les hommes, nous ne vivrons jamais. Elle en prend plein la gueule depuis toujours. Si moi, j'avais ouvert ma gueule il ne se serait jamais passé ça. Désolé de le dire à tous les hommes de France, mais la personne qui a eu le plus de couilles ce week-end, c'est Ultia", avait alors réagi le streameur Ponce, apportant son soutien à la jeune femme.
Ce 25 octobre, à la suite de la prise de parole de Maghla, c'était au tour de la vidéaste Charlie Danger de faire valoir sa voix sur Twitter : "Je suis silencieuse et absente depuis 5 mois. Pas de vidéo, rien. Je vais dire parce que alors que j'avais jamais prévu de le faire, mais c'est trop important : J'ai sauté d'un pont il y a 2 mois", révèle-t-elle dans ce thread. "Pour le contexte : Je n'étais pas suicidaire. J'ai fait une énorme attaque de panique à la suite de plusieurs mois de harcèlement intense, répété. Ils ont retrouvé mon adresse, m'ont menacée de viol et de mort. Des centaines de pages de forums. Des sub reddits, des emails, des MP."
Il est plus que nécessaire de rappeler que ces comportements sont inacceptables. L'outrage sexiste, qui consiste à imposer à une personne un propos ou un comportement à connotation sexuelle ou sexiste, qui porte atteinte à sa dignité ou l'expose à une situation pénible est une infraction qui peut être punie d'une amende pouvant aller jusqu'à 750 €. Quant au cyber-harcèlement, il est reconnu comme un délit, sanctionné par des peines d'amendes ou/et de prison.
En cas de cyber-harcèlement, vous pouvez contacter le 3018 par téléphone.