Terrafemina : La proposition de Viviane Reding d’imposer des quotas de femmes dans les conseils d’administration pour les pays de l’UE a été retoquée par la Commission européenne. La France faisait office de porte-drapeau avec la Loi Copé-Zimmerman. Comment avez-vous accueilli cette décision ?
Sophie Auconie : Je regrette une telle décision. Je soutiens la Loi Copé-Zimmerman sur la féminisation des conseils d'administration. Grâce à cette loi, la France qui doit atteindre les 40% de femmes dans les conseils d’administration pour 2016, compte déjà 22% de femmes administratrices. Nous sommes même allés plus loin avec l’association « Femmes au Centre » que je préside, puisque l’on a proposé que cette loi soit étendue aux entreprises publiques et aux institutions étatiques en France. Ce sera bientôt le cas, puisqu’une loi pour imposer les femmes dans la haute fonction publique a récemment été adoptée en France.
S. A. : Je pense que le terme « quota » fait peur, en raison de son aspect contraignant. C’est ce qui explique à mon avis le rejet d’une partie des pays de l’UE. Toutefois, malheureusement, laisser cette liberté aux entreprises ne permet pas d'atteindre notre objectif, celui d'une véritable égalité entre les hommes et les femmes au sein des CA. Je n’aime pas non plus le terme « quota » mais ce système s'avère plus efficace. Si c’est la seule solution pour briser le fameux « plafond de verre » dont les femmes sont victimes, alors il faut continuer à se battre.
S. A. : Les traités de l'Union consacrent l'égalité entre les hommes et les femmes. La France est sur la bonne voie mais certains pays européens restent réfractaires concernant les méthodes contraignantes visant à imposer la parité entre les hommes et les femmes. Il existe aujourd’hui des divergences de mentalités sur ces enjeux entre les pays scandinaves par exemple, très modernes sur ces questions, et des pays plus traditionnalistes, comme la République Tchèque. Au niveau européen, le débat est extrêmement vif et nourri mais de manière originale. En effet, au sein du Parlement européen, il existe un consensus entre les principaux partis au sujet de la nécessité de renforcer la présence des femmes au sein des conseils d'administration. L'opposition se situe davantage au niveau des États membres eux-mêmes. En effet, 9 pays dont le Royaume-Uni et les Pays-Bas se sont déjà prononcés contre ces mesures contraignantes. Ces propositions n’étant qu’à un stade préliminaire, le débat parlementaire proprement dit n’a pas encore eu lieu. Les années de rhétorique n'ont pas permis de suffisamment faire évoluer la situation des femmes. C'est pourquoi je pense qu'instaurer des mesures contraignantes constitue une nécessité. Le niveau européen est le meilleur à mon avis pour traiter de ces questions car c’est l’UE qui donne aujourd’hui l’impulsion aux Etats membres.
S. A. : L’UE est au niveau mondial plutôt un bon élève en ce qui concerne la présence des femmes au sein de ses institutions. Ainsi le Parlement européen comprend 31% de députées femmes et la Commission européenne 10 commissaires femmes sur 27, soit 37%. Des progrès sont encore à réaliser, y compris au niveau européen. La composition du directoire de la Banque centrale européenne en est l'illustration criante. Je reste persuadée que ce sont les institutions prestigieuses comme la BCE qui doivent montrer l’exemple en matière d’égalité. La commission en charges des affaires économiques et monétaires a ainsi refusé de soutenir la candidature d'Yves Mersch sur ce motif. Néanmoins, j'estime que vu les difficultés économiques que connaît l'Union européenne actuellement, nous avons rapidement besoin que la Banque centrale européenne soit pleinement opérationnelle. C'est pourquoi je soutiendrai la candidature d'Yves Mersch lors du vote ce jeudi, tout en appelant ardemment à un renforcement de la représentativité au sein de cette institution. Le groupe du Parti Populaire Européen suivra d'ailleurs cette position, privilégiant une résolution rapide de la crise de la zone euro à un blocage dogmatique du fonctionnement de cette institution centrale. La parité doit être améliorée mais elle ne doit pas non plus devenir un frein à la résolution de la crise de la zone euro.
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